Quebec History Marianopolis College


Date Published:
Juin 2006

L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia

 

William Pitt

 

PITT (William) (1708-78), comte de Chatham, homme d'Etat, ministre de la Guerre.

 

Son grand-père, Thomas Pitt (1653-1726), était un bourgeois négociant, membre de la Compagnie des Indes orientales, devint gou­verneur de Madras, s'y enrichit dans le com­merce des diamants; revenu en Angleterre en 1710, il y acquit de vastes propriétés et reprit son siège aux Communes, qu'il avait délaissé en 1695. Son petit-fils William devait illustrer la famille.

 

Né à Westminster le 15 novembre 1708, il fit ses études à Eton et à l'Université d'Ox­ford, voyagea en France et en Italie et se fit élire au Parlement, en 1735. Bientôt il est à la tête des « jeunes patriotes », et le Prince de Galles, marié récemment, le nomma gentilhomme de sa chambre. Pitt attaqua vivement la politique d'Horace Walpole, qui se démit du gouvernement, en février 1742: plus énergiquement encore, il dénonçait les sympathies hanovriennes de George II. Cet élan de patriotisme lui valut une énorme popularité. Suivirent des luttes oratoires avec Henry Fox et des divergences politiques avec le roi. Enfin Pitt, soutenu par l'opinion publique, saisit solidement le portefeuille de la Guerre (1757).

 

Son administration fut brillante : il s'étu­dia à réparer les désastres, par exemple la déroute maritime de l'amiral Byng et la perte de Minorque, fort sensibles à l'orgueil britan­nique. « Mon intention, dit-il, est de sortir l'Angleterre de l'état d'énervement où elle se trouve, et qui permet à 20.000 soldats français de la troubler. » Personnage grave, homme de fortes convictions et de résolutions décisives, orgueilleux à l'extrême, orateur pompeux et théâtral, il était réellement le génie appelé à réveiller l'énergie d'un peuple et à lui inspirer la foi inébranlable qu'il avait en lui-même.

 

Quand Pitt prit possession de son minis­tère, la Guerre de Sept Ans était amorcée depuis un an (1756). Il eut l'habileté de s'assurer l'amitié de son allié, Frédéric II de Prusse, auquel il garantit plus de livres sterling que de soldats mercenaires : il réservait ces derniers, unis aux réguliers écossais, irlandais, anglais, pour réduire les troupes françaises et miliciennes de la Nouvelle-France.

 

Bien plus, la marine britannique fut mise sur un pied de guerre formidable. C'est elle qui sut prévenir, à Quiberon et ailleurs, une tentative de descente et d'invasion sur le lit­toral de l'Angleterre. C'est elle qui prit, avec les amiraux Boscawen, Hawke, Mostyn, Du­rell, Saunders, l'initiative des hostilités, même en temps de paix, avant de s'emparer de Louisbourg (1758) et de soutenir l'armée de Wolfe devant Québec (1759). Les prévisions de conquête, qui hantaient l'esprit de Pitt, contre-balançaient d'avance les énormes dépenses d'une guerre maritime et continentale à la fois. La réussite de ses grandioses desseins vint asseoir sa renommée, sa gloire et son apothéose.

 

En 1766, le roi George III, fils du Prince de Galles, lui conféra la pairie, avec le titre de comte de Chatham, et la mission de former un cabinet, dont la composition souleva contre lui le mécontentement de la nation et de la législature entière. Le 15 octobre 1768, Pitt donna sa démission. Deux ans après, il reparut avec éclat sur la scène politique. Dès lors, en véritable homme d'Etat, il ne se lassa point de blâmer avec virulence les agissements de la métropole à l'égard des Colonies amé­ricaines. « Si vous persistez, assurait-il, à taxer les Américains, la guerre étrangère est suspendue sur vos têtes par un fil léger. » Le visionnaire devint prophète. Il se traîna, malgré un accès violent de goutte, à la Chambre des lords, le 17 avril 1778, y prononça un discours inintelligible et tomba frappé d'apoplexie : conduit à la campagne de Hayes, il y mourut le 11 mai suivant.

 

Le Parlement lui vota des funérailles pu­bliques et un monument à l'abbaye de West­minster. Les villes de New-York et de Charlestown lui érigèrent des statues ; ses dettes furent liquidées, sa famille fut pourvue; et l'Angleterre a voué un culte à l'orateur puis­sant, au patriote ardent, à l'homme d'Etat qui l'avait élevée à un si haut degré de prospérité et de gloire.

 

Son fils 'William (1759-1806) s'est illustré aux yeux de la postérité.

 

Le nom du lord est affecté au Canada à des comtés, villes et localités.

 

Source : Louis LE JEUNE, «William Pitt», dans Dictionnaire général de biographie, histoire, littérature, agriculture, commerce, industrie et des arts, sciences, mœurs, coutumes, institutions politiques et religieuses du Canada, Vol. II, Ottawa, Université d’Ottawa, 1931,  829p., pp. 445-446.

 
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