Quebec History Marianopolis College


Date Published:
Juin 2006

L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia

 

Louis-Antoine de Bougainville

 

BOUGAINVILLE ( Louis- Antoine de ) (1729-1811), avocat, adjudant, secrétaire d'ambassade, membre agrégé de la Société Royale de Londres, capitaine réformé, colonel. chevalier de Saint-Louis, capitaine de frégate et de vaisseau, navigateur au long cours, chef d'escadre, maréchal de camp, vice-amiral, membre de l'Institut, comte de l'Empire, chevalier de la Légion d'honneur. — Bougainville, bourg actuel d'environ 500 âmes dans la Somme.

 

Né le 11 novembre 1729, il était fils d'un notaire de Paris. Après avoir terminé son cours d'études des langues anciennes et des sciences exactes, il publia, à l'âge de 25 ans, un traité sur le calcul intégral. Ensuite il étudia le droit et fut admis au barreau, mais ce n'était que pour être agréable envers sa famille. En 1753, il prit du service dans l'ar­mée, muni aussitôt du grade d'adjudant dans le bataillon de Picardie, son pays d'origine. En 1755, on le nomma secrétaire de l'ambassadeur de France à Londres, où l'on s'em­pressa de l'admettre au nombre des membres de la Société Royale.

 

En 1756, on le choisit comme premier aide-de-camp du marquis de Montcalm ; il était lieutenant ou capitaine réformé à la suite de la suppression du régiment des dragons d'Apchon. Le 2 mars, le général lui décernait, dans une lettre de Paris, un éloge en ces termes : « J'ai trois aides de camp... Bougainville, homme d'esprit, de société, aimable, protégé par M. de Séchelles...». Dans son Journal, il ajoute : « C'est un jeune homme qui a de l'esprit et des belles-lettres, grand géomètre, connu par un ouvrage sur le calcul intégral; il est de la S.-R: de Londres, aspire à être de l'Académie des Sciences de Paris, où il aurait une place, s'il n'avait pas préféré d'aller en Amérique apprendre le métier de la guerre et donner des preuves de sa bonne volonté. Il est frère de M. de Bougainville, ci-devant secrétaire de l'Académie Royale des Inscrip­tions, très connu dans la république des let­tres. M. de Bougainville m'est très recom­mandé par M. de Séchelles, par Mme Hérault — son fils unique étant l'ami intime du protégé — et même par Mme la marquise de Pompadour, et a mis à profit un voyage qu'il a fait en Angleterre et en Hollande.» Le 14 du même mois, M. de Bougainville fut reçu en audience royale avec son général, nommé maréchal de camp, ce qui équivalait au grade actuel de général de brigade. A la fin du mois, à Brest, il s'écriait devant les uniformes des troupes qui s'embarquaient : « Quelle nation que la nôtre ! Heureux qui la commande et qui en est digne ! » Le 26, M. de Montcalm et son aide de camp montaient sur la Licorne, commandée par M. de la Rigaudière. Le marquis a décrit la terrible tempête en mer. Le 13 mai, M. de Bougainville débarquait à Qué­bec.

 

Le 26 mai, il accompagna son général à Montréal dans son entrevue avec le gouver­neur, M. de Vaudreuil. Le 21 juillet, tous deux s'embarquent à Lachine pour se rendre au fort Frontenac, en passant auparavant par la Présentation. Le 14 août, il est à côté de M. de Rigaud à Chouaguen : « Je fus envoyé, écrit-il, pour faire avec lui ce fameux passage de la rivière et sommer ensuite les Anglais, à un signal convenu. Ce fut dans cet intervalle qu'ils arborèrent le drapeau blanc. » Deux officiers anglais vinrent deman­der à M. de Montcalm quels termes il accor­derait à la garnison. Le général chargea M. de Bougainville et M. de La Pause d'aller arrêter les articles de la capitulation. Le 16 septembre, rendu à Carillon, M. de Montcalm envoya 600 Sauvages, 100 Canadiens et 20 officiers ou cadets de la colonie, sous les ordres de M. Boucher de La Perrière, en expédition vers le lac Saint-Sacrement : M. de Bougainville et trois autres officiers français accompagnaient ce parti, qui s'avança jusqu'à quatre lieues du fort William-Henry. Mais la campagne fut ren­voyée à l'année suivante.

 

M. de Montcalm écrivait au ministre : « M. de Bougainville a l'honneur d'être connu de vous. Vous ne pourriez croire les ressources que je trouve en lui. Il est en état de bien rendre ce qu'il voit. Il se présente de bonne grâce au coup de fusil, article sur lequel il a plus besoin d'être contenu que d'être excité... Il n'y a guère de jeune homme qui, n'ayant eu que de la théorie, en sache autant que lui. » (Lett. du 30 août 1757.) Le 1er novembre, il écrit encore : « M. de Bougainville vous regarde comme son protecteur à la guerre et son Mécène dans la républi­que des lettres; s'occupant beaucoup de son métier, il ne perd pas de vue l'Académie des Sciences; il a vu par les nouvelles publiques qu'il y vaquait une place de géomètre, à laquelle il aurait cru pouvoir aspirer par vos bontés et son ouvrage, s'il eût resté en France; est-ce que d'être en Amérique passagèrement et pour le service du Roi lui en donnerait l'exclusion ? Ne pourrait-on pas la lui conserver en la laissant vacante ? Je vous en serais bien obligé en mon particulier. » Au mois d'avril, M. de Bougainville écrivait dans son Journal son avis motivé concernant la tentative contre William-Henry : il y consigne les propositions du général et la trop grande promptitude de M. de Rigaud dans la sommation au commandant Eyre. Le 16 du mois, dans une lettre à sa femme, Montcalm avoue que « Bougainville a du talent, la tête et le coeur chauds : cela mûrira. » Le mois suivant, l'aide de camp visi­tait l'île Sainte-Hélène, la réserve des Sulpiciens à la Montagne. Le 9 juillet, Montcalm et lui, ainsi que quelques officiers, y revinrent « chanter la guerre » des Sauvages, avant le départ pour William-Henry.

 

La correspondance et le Journal, durant le siège, relèvent tous les détails du mouve­ment des 7.000 hommes, des travaux de tran­chées, des préparatifs d'assaut, depuis le 26 juillet jusqu'à la mi-août. Le 7, le général fit arborer le drapeau parlementaire et envoya au fort M. de Bougainville, accompagné d'un tambour et de 18 grenadiers. Le député fut reçu par un officier et 15 grenadiers anglais; on lui banda les yeux et on le conduisit au fort et de là au camp retranché, où il remit au commandant le message. Le colonel Monroe répondit qu'il remerciait le général de cet acte d'honnêteté, mais refusa la capitu­lation. Il tenta aussitôt une sortie vers le fort Lydius : mais M. de Villiers lui tua 50 hommes, fit quatre prisonniers et refoula les autres dans leurs tranchées. On hâta les travaux d'approche et l'artillerie anglaise fut en partie démontée : 300 hommes étaient tués ou blessés; la vérole allait décimer les autres. Le 9 août, Monroe fit arborer le drapeau blanc. Les Français comptaient 17 tués et 40 blessés. M, de Bougainville fait observer dans son Journal que l'on eût pu avoir la garnison prisonnière de guerre, ou même à discrétion : « mais, ajoute-t-il, dans le premier cas, c'eût été 2.000 hommes de plus à nourrir, et la colonie manque de vivres ; dans le second, on n'eût pu retenir la barbarie des Sauva­ges : il n'est jamais permis de sacrifier l'humanité à ce qui n'est que l'ombre de la gloire ». Après avoir, par politique, consulté les chefs indiens combattants, le général re­çut leur assentiment au sujet des clauses à imposer aux vaincus; et M. de Bougainville, qui réfléchissait sur le moindre incident, fait cette remarque : « L'on voit, par cette démarche du marquis de Montcalm, à quel point on est dans ce pays esclave des Sauvages: ils sont un mal nécessaire. » Ainsi rassuré du bon vouloir des tribus, le général dépêcha encore son aide de camp au colonel George Monroe avec les articles arrêtés. Les signatures échangées, M. de Bougainville partit sur ordre pour Montréal, où il porta la nouvelle de notre glorieux succès. Toutefois, avant de se mettre en route, il jeta dans son Journal une note quasi prophétique : « L'on sera très heureux si l'on parvient à obtenir qu'il n'y ait point de massacre (des prison­niers anglais) : détestable situation dont on ne peut donner une idée à ceux qui ne s'y sont pas trouvés, et qui rend la victoire même douloureuse aux vainqueurs. » En effet, les Sauvages, partis de William-Henry le 11 et 12 août, arrivèrent à Montréal avec 200 pri­sonniers. D'après M. de Bougainville, M. de Vaudreuil les gronde d'avoir violé la capi­tulation; ils s'excusent et rejettent la faute sur les domiciliés — Sauvages vivant ensem­ble dans une réserve.

On leur annonce qu'il faut rendre les Anglais pris injustement et qu'on leur paiera deux barils d'eau-de-vie pièce; le 15, à deux heures, en présence de toute la ville, ils en tuent un, le mettent à la chaudière et forcent ses malheureux com­pagnons à en manger. Pourtant M. de Montcalm, selon les instructions qu'il donna à son aide de camp, lui avait ordonné de préve­nir les Anglais du fort de jeter à l'eau vin, eau-de-vie, toutes les liqueurs enivrantes. A la fin de la campagne si heureuse, M. de Bou­gainville écrivait avec raison « qu'il ne ferait point l'apologie de son général, car sa conduite parle elle-même; qu'il peut assurer, comme témoin oculaire, que tout le monde dans le pays, Canadiens et Sauvages, ont été enchantés de la faveur du Roi, en le nommant commandeur de l'Ordre militaire de Saint-Louis. »

 

Le 10 octobre 1757, il accompagnait le général dans une tournée d'inspection au Cap-Tourmente, dans le dessein de lever au besoin le plan d'un camp retranché pour la défense de Québec. Durant la saison d'hiver, M. de Bougainville à Québec, prit part, comme les autres officiers aux festins, aux bals, aux jeux de hasard chez Bigot et ailleurs : toutefois il ne risquait que des sommes fort modestes. « Bougainville, écrit le marquis de Montcalm, qui a de l'argent de reste, a été voir ses frères Iroquois au Saut-Saint-Louis, pour leur donner 150 liv. de tabac et du vermillon. Au retour, il a couru véritablement risque de se noyer »; plus tard, en avril 1758, il ajoute : « Bougainville est captivé ailleurs; il reprend des liens qui s'étaient relâchés. Malgré son esprit, il se repaît quelquefois, dirait-on, de châteaux en Espagne.»

 

A Carillon, M. de Bougainville prit une glorieuse part à l'action et à la victoire. Après un duel épistolaire entre M. de Vaudreuil et le général, celui-ci envoya son aide de camp à Montréal, le 7 août, avec la mis­sion de porter au gouverneur des paroles de paix, des explications loyales et un message de concorde et de mutuelle entente : le paci­ficateur revint, le 13, à Carillon. « L'union me paraît, dit-il, rétablie parfaitement et de bonne foi entre nos chefs, je souhaite que les faits y répondent. » Le 6 septembre, Montcalm et M. de Bougainville quittaient Carillon pour Montréal, à la nouvelle de la prise de Frontenac (27 août) par le colonel Bradstreet et des préparatifs ennemis. Gouverneur et général se détermi­nent à envoyer un officier en France pour exposer à la Cour de vive voix la situation : le choix de Bougainville est agréé des deux et on lui adjoint M. Doreil. Le marquis de Montcalm écrivit au ministre, le 21 octobre1758: « Il est à souhaiter que l'un et l'autre arrivent, et je vous conjure d'ajouter foi à ce qu'ils vous diront. M. de Bougainville se propose de nous revenir, car son zèle pour le service ne connaît aucune difficulté...» Le plénipotentiaire de la colonie s'embarqua sur la Victoire, le 2 novembre, chargé d'une volumineuse correspondance. Il débarquait en France à la fin de décembre, se trouvant, le 20, à Versailles.

 

Il y déploya un grand zèle pour faire accepter les plans de son général. Mais l'état critique des affaires administratives et mili­taires vouait d'avance sa mission à l'insuc­cès, au moins eu égard aux renforts des troupes. Après trois mois d'instances, de sollicitations, d'entrevues avec M. Berryer, le maréchal de Belle-Isle et Mme de Pompadour « premier ministre» du Roi, il écrivait une dépêche chiffrée à M. de Montcalm et au gou­verneur : « Pour toutes troupes 300 hommes de recrue, 4 ingénieurs, 24 canonniers et ou­vriers. Munitions de guerre, vivres dans deux vaisseaux marchands partis de Bayonne le 16 février, 20 autres partis de Bordeaux, qua­tre frégates de Brest et de Rochefort et d'autres d'ailleurs : nul vaisseau de guerre... Qué­bec sera attaqué : les autres frontières aussi. La Cour ne veut aucune capitulation de vo­tre part. Conserver un pied au Canada à quelque prix que ce soit; mot sur ce point découragerait, s'il était connu.» Dans une lettre confidentielle à Montcalm, il ajoutait : « L'incorporation de la milice approuvée et non recommandée; retraite à la Louisiane admirée, non acceptée. » Puis, dans son Jour­nal, ayant noté sa promotion au grade de colonel et à la croix de Saint-Louis : « Je ne réussis pas, à beaucoup près, aussi bien pour la cause commune. M. Berryer, fait de lieute­nant de police ministre de la Marine, ne voulut jamais comprendre que le Canada était la barrière de nos autres colonies, ni accepter le projet d'attaque de la part des Anglais. Ce ministre aimait les paraboles et me dit fort pertinemment qu'on ne cherchait point à sauver les écuries, quand le feu est à la maison. Je ne pus donc obtenir pour ces pauvres écuries que 400 hommes de recrue et quelques munitions de guerre. » Personnellement il fut gratifié d'une pension de 400 livres. « Toute la France, dit-il, m'a chargé de compliments pour M. de Montcalm... Le roi dit : Nos braves soldats du Canada ! » Le délégué était de retour à Québec, le 10 mai, avec le contingent de recrues. Le 21, il des­cendait avec le général, de Montréal à Qué­bec, en vue d'organiser la défense de la capitale. On le plaça, ainsi que l'ingénieur de Pontleroy à l'île d'Orléans : ils étudièrent le terrain, de la rivière Saint-Charles à Montmorency et l'on décida aussitôt la construction d'un camp retranché, muni d'une série de redoutes et de batteries. Le 11 juin, le marquis écrivait : « M. de Bougainville commande le camp d'au-delà de la rivière Saint-Charles, pour les travaux : il a à ses ordres, cinq compagnies de grenadiers et 500 Canadiens. »

 

M. de Bougainville avait cessé d'agir comme aide de camp : nommé en 1758 aide maréchal général des logis, promu en février 1759 colonel des troupes, il fut chargé, le 6 août, d'aller prendre le commandement du corps d'observation au-dessus de Québec; on lui avait donné, pour renforcer ce corps les grenadiers de Béarn, un piquet de Languedoc et un autre de milice. Dans la nuit du 7 août, le brigadier Murray tenta deux fois d'atterrir avec ses berges, montées de 1.800 hommes, en face de la Pointe-aux-Trembles; deux fois le détachement de Bougainville le força à se rembarquer avec perte. Les An­glais allèrent alors sur la rive Sud incendier le village de Saint-Antoine. L'on manda aussitôt à M. de Bougainville de les poursuivre, si la chose était possible : un vent violent et un épais brouillard l'en vinrent empêcher. Le 14, Marcel lui écrivait : « M. de Montcalm assemble actuellement 200 bons Montréalistes pour vous aller joindre et il se prive en votre faveur du plus pur de son sang. » Le 17, nouvelle alerte à Québec d'une des­cente anglaise à Deschambault : Montcalm s'y précipite à toute bride et pousse à la Pointe-aux-Trembles, où il apprit que les troupes de Bougainville et la cavalerie de M. de la Rochebeaucour étaient arrivées à temps pour faire rembarquer les ennemis. Le colonel et ses hommes avaient fait une marche de 14 lieues:

 

Le 3 septembre, les Anglais, ayant levé leur camp de Montmorency pour se porter sur Lévis et le haut du fleuve, M. de Montcalm écrivit au colonel qu'il plaçait le régiment de Guyenne en réserve sur le chemin de Sillery, au besoin mis à sa disposition ou apte à revenir vers Québec. Malheureusement, le mauvais génie de M. de Vaudreuil lui ins­pira d'annoncer, le 6 du mois, à M. de Bougainville une disposition de ce régiment tout à fait opposée. Le colonel avait sous ses ordres environ 2.200 hommes — sans compter les Sauvages — ainsi répartis : 100 au Foulon commandés par le capitaine Vergor; 30 à Samos, 50 à Saint-Michel sous Douglas, 100 à Sillery sous M. de Remigné, 250 au Cap-Rouge sous M. de Beaubassin, 180 à Saint-Augustin, 190 à la Pointe-aux-Trembles et 200 à Jacques-Cartier; il avait encore sous la main un corps ambulant de près de 1.000 combattants, composé de la cavalerie, des volontaires de Duprat, de ceux de M. de Repentigny, des piquets tirés des régiments français. Le 10, le munitionnaire Cadet informa M. de Bougainville que des bateaux chargés de farine allaient descen­dre de Batiscan, le priant de protéger leur passage. Le 12, il lui mande que ce convoi passe la nuit suivante : funeste coïncidence, car c'était la nuit même choisie par Wolfe pour opérer son débarquement. Il se fit, en effet; les troupes escaladèrent le ver­sant du promontoire, surprirent le poste de Vergor qu'il avait réduit à 30 hommes endormis et envahirent les plaines, le 13, à cinq heures du matin.

 

Avant de livrer bataille, M. de Montcalm s'écria avec une poignante anxiété : « Est-il possible que Bougainville n'entende pas le canon? » Celui-ci avait appris l'affaire vers huit heures et demie. Il réunit aussitôt 900 hommes et marcha vers le plateau qu'il ne pouvait atteindre qu'après avoir franchi sept à huit milles à la hâte : c'est-à-dire vers onze heures, après la défaite. Il était arrivé à Sillery où, laissant une centaine de soldats escar­moucher avec des compagnies de l'infanterie légère anglaise, postées dans une maison, il avait paru sur les derrières de l'armée enne­mie, au moment où la déroute de nos trou­pes était complète. « J'y marchai aussitôt, dit-il, mais quand j'arrivai à portée de combattre, notre armée était battue et en déroute. Toute l'armée anglaise s'avança pour m'attaquer. Je fis ma retraite devant elle et me portai de façon à couvrir la retraite de notre armée ». Townshend a déclaré dans son Journal que Bougainville arriva après la déroute générale. Il retraita à Sainte-Foi pour attendre des ordres. Le 14, il apprit la mort de Montcalm : « M. le marquis, dit-il, avait fait une campagne digne de M. de Turenne et sa mort fait nos malheurs. »

 

L'année suivante, au mois d'août, M. de Bougainville est à la tête des troupes avec M. de Bourlamaque. Le 8 septembre, M. de Vaudreuil le délègue vers Amherst avec des propositions de capitulation : il avait tenu tête au major Haviland à l'Ile-aux-Noix et à Longueuil. Après la signature officielle des articles, M. de Lévis chargea M, de Bougain­ville de l'embarquement des troupes à Qué­bec, rapatriées par des vaisseaux anglais.

 

Rentré en France, M. de Bougainville en­tra, en 1763, dans le service naval avec le grade de capitaine. Il obtint du roi l'autori­sation de coloniser les îles Falkland […]. Mais cet établissement excita la jalousie des Espagnols : le roi leur concéda ces îles, moyennant le versement d'une indemnité au colonisateur, qui y travaillait depuis trois ans.

 

En 1766, M. de Bougainville reçut le com­mandement de la frégate la Boudeuse et de la flûte l'Etoile et mit à la voile, en décembre, pour un voyage de découverte. Après avoir, d'abord, remis les îles aux Espagnols, il se livra tout entier à son expédition. Il fit escale à Buenos-Ayres, franchit le détroit de Magel­lan, visita l'archipel Tuamatu et Tahiti. Il traversa l'Océan Pacifique, découvrant les Iles des Navigateurs, les Nouvelles-Hébrides et les Iles Salomon. En 1769, il était de retour en France. En 1771, il publia le récit de son voyage, dans un style simple, exact et spirituel. Le succès de l'ouvrage fut immense.

 

Durant la guerre de l'Indépendance américaine, M. de Bougainville accepta le com­mandement naval et servit avec éclat, de 1779 à 1783: il se signala dans un engagement près de la Martinique entre Rodney et de Grasse, le 12 avril 1783, en ralliant et en sauvant huit unités de sa division navale. Créé chef d'escadre, il quitta néanmoins la mer pour devenir maréchal de camp. Après la paix de Paris, il reçut un fauteuil à l'Académie. Puis il projeta une expédition au pôle Nord, laquelle ne fut pas agréée du gouver­nement. En 1791, il fut promu vice-amiral.

 

Après avoir échappé aux massacres de la Terreur, il se retira de la vie publique. Elu membre de l'Institut au berceau, il devint aussi membre du Bureau des Longitudes. Sous l'Empire, Napoléon le nomma sénateur, comte, chevalier de la Légion d'honneur. M. de Bougainville mourut à Paris le 31 août 1811.

 

Les ouvrages qu'il a publiés sont intitulés : Traité du calcul intégral, 2 vol. Paris 1754-56; Voyage autour du monde, ib., 1771; Essai sur les navigat. anc. et modern., Rapp. de l'Acad. des Scienc. et Polit., t. I; Notice histor. sur les Sauv. de l'Amér. sept., it. t. III; Let­tres de Bougainville au Canada, Ottawa, Rapp. des Arch., 1926.

[On pourra consulter avec profit la biographie de Bougainville au Dictionnaire biographique du Canada.]

 

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Source : Louis LE JEUNE, «Louis-Antoine de Bougainville», dans Dictionnaire général de biographie, histoire, littérature, agriculture, commerce, industrie et des arts, sciences, mœurs, coutumes, institutions politiques et religieuses du Canada, Vol. I, Ottawa, Université d’Ottawa, 1931,  862p., pp. 217-221.

 
© 2006 Claude Bélanger, Marianopolis College