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L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia
Jeunesse - Études de Georges-Étienne Cartier
Georges-Etienne Cartier naquit le 6 septembre 1814, à Saint-Antoine-sur-Richelieu, dans la contrée la plus fertile du Québec, et non la moins belle par ses sites et par son histoire. Le Richelieu, autrefois appelé la rivière des Iroquois, puis la rivière Chambly, prend sa source dans le lac Champlain, forme le bassin de Chambly en s'élargissant à mi-chemin, et se jette dans le Saint-Laurent, après une course de quatre-vingts milles. Comme des sentinelles géantes, des clochers clairs ou couleur de feuilles mortes, sont échelonnés sur les deux rives de six milles en six milles. Quelques montagnes isolées rompent la monotonie de la plaine et de l'horizon.
Le Richelieu et l'Hudson relient le Saint-Laurent à la Nouvelle-York. C'était autrefois la grande voie des invasions des barbares, Iroquois et Bostonnais, qui pour nous vinrent du sud plutôt que de venir du nord. Sorel, Chambly, Saint-Jean, l' Ile-aux-Noix, le fort Sainte-Anne du Lac Champlain, et Carillon à la tête du lac, furent témoins de beaux faits d'armes.
Né peu de temps après la guerre de 1812 et cinquante ans seulement après la cession du Canada par le traité de Paris, le jeune Georges-Etienne, durant les longues soirées d'hiver, entendit souvent les « vieux » parler de poudre et de canons. Rien d'étonnant qu'après avoir fait ses études classiques chez les Messieurs de Saint-Sulpice et s'être enthousiasmé pour les héros de l'histoire, il ait senti une ardeur combative dans ses veines en se rappelant les bruits de guerre de sa propre patrie, et à la lecture comme au récit des événements qui se passaient alors à Québec.
Admis au barreau en 1835, il avait fait son stage dans l'étude d'Edouard Rodier, un ardent patriote et un tribun populaire. On peut croire qu'il n'y avait pas appris à aimer lord Aylmer ni le trop fameux Family Compact, et que les conversations politiques l'avaient empêché de méditer Pothier et Cugnet.
L'enthousiasme le fit entrer dans les rangs des Fils de la Liberté; il fut le secrétaire du comité. Il suffit de quelques parades avec chants et discours pour faire perdre la tête à ces bonnes gens au coeur brave. Leur générosité fait oublier leur témérité.
Le jeune avocat fit le coup de feu à Saint-Denis, en 1837, contre les troupes du colonel Gore, un vétéran de Waterloo, et le Dr. Wolfred Nelson lui fit l'honneur de l'envoyer, sous les balles de l'ennemi, chercher du renfort à Saint-Marc. Nos paysans, armés de quelques fusils, de fourches et de solides bâtons, repoussèrent les Anglais supérieurs en nombre et appuyés par l'artillerie.
Après cette victoire, ce furent des défaites au compte des insurgés, des pillages, des incendies et des massacres au crédit des répresseurs. La tête de Cartier ayant été mise à prix, il s'enfuit aux Etats-Unis, d'où il revint à Montréal, en août 1838, après l'amnistie. La paix de l'exil le porta à la réflexion. Il comprit bien vite le tort des chefs qui avaient poussé le peuple à prendre les armes contre toute espérance de succès. Il leur en fit un reproche plus tard, sans rougir toutefois de son erreur parce qu'elle avait été courageuse.
Le Colonel Wolseley, un ambitieux dont les plans furent déjoués par Cartier en 1870, lui rappelle avec l'intention de diminuer sa réputation de loyauté, dans le Blackwood's Magazine de décembre de la même année, la part qu'il prit à l'insurrection de 1837.
Cinq ans après la mort de Cartier survenue en 1873, le marquis da Lorne devint gouverneur du Canada. Ce qu'il avait appris sur son compte en Angleterre et dans notre patrie lui permit d'écrire un jour que Cartier fut l'un des plus loyaux serviteurs de la Couronne et un grand homme d'Etat (1).
Rentré à Montréal, après une année de troubles, Cartier se mit à la pratique de sa profession. Il devint l'associé de Louis-Hippolyte Lafontaine et d'Amable Berthelot. Conscient des luttes à venir et de ses propres forces, il se mit à étudier avec ardeur. Inférieurs en puissance et en richesse, se disait-il, nous devons être supérieurs par l'intelligence et par la volonté, et un jour nous jouirons de toutes les libertés nécessaires à notre plein développement national.
Cartier se sentait fait pour la lutte. Son esprit combatif le poussait à prendre une part active dans la gouverne de l'opinion et de la chose publiques. Assez intelligent et assez consciencieux pour comprendre que la politique est un art qu'il faut étudier avant de l'exercer, il se pénétra de la connaissance du droit et de nos droits, de la constitution anglaise, de notre histoire. Studieux, honnête, d'un jugement droit, il se fit bientôt remarquer au barreau, et les bonnes causes affluèrent.
Rompu aux affaires, aux hommes, il put affronter le grand public, lui dire ses espérances et les vérités nécessaires.
« A boy who served gallantly in the insurrection became afterwards Sir Georges Cartier, loyal amongst the loyal, and a leader in Canadian statesmanship. » - The Marquis of Lorne, Imperial Federation, London 1885, p. 45.
Source : Charles-Édouard LAVERGNE, « Jeunesse - Études », dans Georges-Étienne Cartier - Homme d'État canadien : 1814-1873, Montréal, Langevin et l'Archevêque, 1914, 91p., pp. 23-28.
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Claude Bélanger, Marianopolis College |