Quebec History Marianopolis College


Date Published:
2004

L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia

APPENDICES

 

Pièce justificative, No 1

 

Je déclare donc que durant la session tenue à Ottawa en 1872, sir Geo.-Étienne Cartier m'ayant prié de m'asseoir à côté de lui à son siège en chambre, me dit et m'a répété en différents temps durant cette session, qu'il avait eu beaucoup à se plaindre de la conduite de sir John MacDonald à son égard et à l'égard du Bas-Canada, lorsqu'il s'est agi de faire passer en Angleterre l'Acte impérial établissant alors la Confédération...

 

Rendu en Angleterre, sir John ne voulait plus de Confédération... mais tout simplement de l'union législative. Sir John a persisté près d'un mois dans cette prétention. Cartier et Langevin se trouvaient seuls pour la province de Québec à repousser une telle prétention, car Galt, m'a dit Cartier, s'était rangé de l'opinion de sir John-A. MacDonald. Cartier m'a dit qu'il avait été indigné de la conduite de ce dernier, lui qui était monté au pouvoir en 1854 et ne s'y était maintenu depuis, que grâce à la majorité du Bas-Canada, car la majorité de la députation du Haut-Canada lui était hostile. C'était de sa part manquer de coeur et de loyauté vis-à-vis le Bas-Canada, le perdre (lui Cartier) politiquement parlant, et mettre la province de Québec à la merci et sous le contrôle des autres provinces.

 

...Enfin, Sir John voulait, en jouant ce coup de Jarnac, annihiler la province de Québec ...

 

... Cartier me dit, voyant la mauvaise foi de Sir John, qu'il écrivit de suite à Sir N.-F. Belleau, qui, heureusement, était alors premier ministre, pour l'informer des misères et des embarras suscitée par sir John, en lui disant que s'il recevait un télégramme de lui, contenant tel mot, de résigner de suite, afin de tout briser. Enfin, après un mois d'efforts pour amener sir Georges à son opinion, sir John pose de nouveau la question: «  Aurons-nous l'Union législative? »

 

Cartier appelé à donner son opinion, répondit par un «  non » assez sec que sir John comprit qu'il ne pourrait pas pousser la chose plus loin.

 

Alors l'Acte impérial fut passé.

 

Cartier m'a dit que dès lors il avait perdu toute confiance en sir John, qu'il ne lui avait pas pardonné son acte de trahison et qu'il ne le lui pardonnerait jamais. Si bien qu'il avait prévenu Mackenzie, alors chef de l'opposition, de ne point imiter George Brown, qui, dans son journal, The Globe, avait sans cesse insulté, vilipendé et injurié les institutions civiles et religieuses du Bas-Canada; donnant à entendre à Mackenzie qu'il y aurait peut-être moyen de s'entendre avec lui. Cette déclaration, je pourrais au besoin l'affirmer sous serment.

 

Je dois ajouter ceci: la veille ou l'avant-veille du départ de Cartier pour l'Angleterre où il allait se faire soigner, je fus le voir à sa résidence à Montréal. Là, il me dit, entre autres choses, qu'il partait malade pour l'Angleterre, qu'il pensait bien ne plus revoir le Canada.

 

Il me pria de me rappeler ce qu'il m'avait dit pendant la dernière session, à l'égard de sir John A. MacDonald et ajouta :

 

« Méfiez-vous de lui, il n'aime pas les Canadiens français, il les déteste. C'est un avis que je vous donne. A vous d'en profiter. »

 

Ainsi m'a parlé Cartier, et je fais cette déclaration solennelle, la croyant sincèrement vraie et en vertu de l'Acte passé dans la 37me année du règne de Sa Majesté, intitulé: « Acte pour la suppression des serments volontaires et extrajudiciaires. »

 

Et j'ai signé :

 

L. ARCHAMBAULT

 

 

Déclaré solennellement devant moi, à l'Assomption, ce 22 décembre 1866.

 

C. CHAPUT J. P.

 

 

No. II

 

                                                

Montréal, 6 nov. 1917

 

Mr l'abbé Lionel Groulx, Montréal.

 

Cher Monsieur l'abbé,

 

Je me rappelle que mon père m'a souvent dit, et a maintes fois répété à d'autres personnes, en ma présence, que Cartier l'avait mis en garde contre les tendances unionistes de sir John A. MacDonald, en lui déclarant qu'à Londres, celui-ci avait fait des efforts pour substituer le régime d'une Union Législative à celui d'une Confédération, que les délégués avaient décidé de faire promulguer par le parlement impérial. Mais ces déclarations auraient été faites verbalement, et non par écrit. Je n'ai jamais vu de lettre dans ce sens, adressée par Cartier à mon père; et je suis persuadé que pareille lettre n'existe pas.

 

Veuillez me croire,

 

Votre respectueusement dévoué,

 

Horace ARCHAMBAULT

 

 

Montréal, 21 novembre 1917

 

Monsieur l'abbé Lionel Groulx,

Montréal.

Cher Monsieur Groulx,

 

Je reçois votre bonne lettre.

A propos de cet incident dont vous parlez, mon père m'a maintes fois répété ceci : de retour de Londres, Cartier déclara à ses amis que, contrairement à ce qui avait été décidé à la conférence de Québec, sir John A. MacDonald avait fait, à Londres, tous ses efforts pour substituer l'Union Législative à une confédération; que MacDonald n'avait abandonné ce projet que parce que Cartier y opposa son refus et qu'il menaça MacDonald de soulever contre lui la Province de Québec. Cartier ajoutait que MacDonald avait, pour obtenir son consentement, employé à son égard tous les moyens, que MacDonald avait même essayé de surprendre sa faiblesse en le faisant enivrer.

 

Je ne crois pas que mon père tînt cette confession de Cartier lui-même. Cartier est mort en 1872 et mon père fut reçu avocat en 1870. Je puis cependant ajouter qu'en 1878 mon père fut élu député du comté de Charlevoix à la Chambre des Communes. Étant conservateur, il fut en relations étroites avec quelques-uns des amis de Cartier, avec certains des hommes qui aidèrent Cartier en 1867 à réaliser le projet de la Confédération canadienne; sir Hector Langevin, par exemple. Des liens de parenté et d'amitié unissaient mon père et l'hon, J. I. Tarte, alors que celui-ci était l'organisateur du parti conservateur. Mon père, qui fut ainsi, dans une certaine mesure, en état de contrôler la déclaration de Cartier, m'a toujours paru y ajouter foi, et ne pas mettre en doute l'attitude énergique que Cartier tint à Londres à ce sujet.

 

Croyez, cher Monsieur Groulx, à mes meilleurs sentiments.

 

Antonio PERRAULT

 

 

 

 

 
© 2004 Claude Bélanger, Marianopolis College