Quebec History Marianopolis College


Date Published:
Octobre 2005

Documents of Quebec History / Documents de l'histoire du Québec

 

Le féminisme au Québec

Feminism in Quebec

 

Le féminisme

[Ce document très révélateur fut écrit par Louis-Adolphe Paquet en 1919. Pour la référence exacte, voir la fin du document.]

Ne dirait-on pas que l'humanité est prise de vertige ? Grisés par l'idée de progrès, des penseurs sans philosophie, et des rêveurs sans boussole, se jettent à la poursuite de toutes les chimères. A peine les mots suffisent-ils pour dénoncer, chaque jour, ce que la fièvre de l'erreur ou le prurit de la nouveauté invente.

Sous le nom de féminisme, un mouvement pervers, une ambition fallacieuse entraîne hors de sa voie la plus élégante moitié de notre espèce, et menace les bases mêmes de la famille et de la société. On n'a pas cru d'abord au danger, tant le succès d'une telle anomalie semblait invraisemblable. L'évidence est venue prouver que rien n'est à l'abri des emballements de l'esprit séduit par le prisme de théories captieuses.

 

Emanciper la femme, telle est la mission que se donnent les champions de l'idée féministe.

 

Certes, si l'on entend par là, soustraire la femme aux puissances qui l'oppriment et aux servitudes qui la dégradent, il y a longtemps que l'Eglise a assumé ce rôle, et qu'elle s'en acquitte avec tout le zèle et tout le dévouement d'une tutrice incomparable. C'est grâce à l'Eglise catholique, continuatrice du ministère sacré de Jésus-Christ, que la femme, si avilie sous le régime païen, a été réintégrée dans sa dignité d'épouse et de mère, dans ses droits de compagne inséparable de l'homme auquel elle a uni ses destinées (1). Tout ce qui honore véritablement la femme, tout ce qui peut l'aider dans l'accomplissement des fonctions qui lui sont propres, tout ce qui peut instruire, élever, développer le sexe féminin dans le sens de sa nature, de sa vocation et de ses besoins, le catho­licisme l'approuve, le bénit, et le favorise.

 

C'est là le vrai progrès.

 

Il y en a un autre, le faux, celui qui se fait au rebours des fonctions féminines, qui s'emploie à reconstruire sur un nouveau modèle le cerveau de la femme, qui tire l'épouse de son foyer pour la jeter sur la place publique, qui supprime la dissimilitude des sexes et la diversité de leurs con­ditions. Ce progrès prétendu, et qui n'est, en réalité, qu'une déviation non seulement de l'esprit chrétien, mais du plus vulgaire bon sens, l'Eglise le réprouve et le dénonce. Entendons, sur ce sujet, les Pères du Premier Concile Plénier de Québec (2) :

 

L'Eglise, assurément, n'interdit pas à la femme d'exer­cer son influence pour le bien en dehors de sa demeure, ni de prendre sa part légitime dans l'action sociale plus nécessaire aujourd'hui que jamais ; mais elle réprouve les théories malsaines, propagées dans ces derniers temps, et dont nous devons travailler à préserver notre pays. Sous le très fallacieux prétexte de libérer la femme des servitudes que l'on dit peser sur elle, on veut tout simplement l'arracher au loyer dont elle a la garde, et la soustraire aux devoirs sacrés que la nature et la Providence lui imposent. Par une regrettable confusion, qui est le fruit de l'ignorance chez les uns, de la malice chez les autres, on laisse entendre que l'égalité entraîne la similitude des droits, et l'on veut que la femme entre en une ridicule et odieuse rivalité avec l'homme, sur un champ d'action où ni les conditions de la lutte, ni les chances du succès ne sauraient être égales. La mise en pratique de pareilles théories serait funeste à la femme et à la famille, et amènerait à bref délai la déchéance de l'un et la ruine de l'autre.

C'est ainsi que les chefs de l'Eglise catholique au Canada caractérisaient, il y aura bientôt dix ans, le mouvement féministe dont ils voyaient poindre, avec appréhension, parmi nous, les symptômes. Ce mouvement, depuis lors, s'est propagé et accentué. Des influences de toutes sortes s'exercent sur la femme canadienne, qui en déforment le rôle, qui en altèrent l'esprit, qui en subvertissent l'action, les manières et les attitudes.

Que de jeunes filles veulent échapper à la tutelle de leurs parents ! que d'épouses se laissent distraire de leurs devoirs les plus pressants par des soucis étrangers ! Certains programmes d'enseignement féminin se gonflent de questions oiseuses, et ne servent d'autre part qu'à gonfler les têtes, sans profit suffisant pour les coeurs. Certains écrits répandent des doctrines et préconisent des façons d'agir opposées aux meilleures traditions familiales. Certaines modes s'enhardissent au-delà de l'extrême limite et constituent un vrai défi à la décence et à la pudeur. Certaines lois sanctionnent les innovations les plus dangereuses, et ouvrent toute grande, à la femme, l'avenue des fonctions publiques.

 

Bref, le féminisme s'est implanté au milieu de nous ; et c'est notre sentiment qu'il croît et qu'il progresse, et qu'il pousse en divers sens ses rameaux, où germent des fruits de mort.

I

Quelles sont donc les racines par lesquelles se nourrit cette végétation malsaine et vivace ? De quelles erreurs et de quelles ambitions est sorti ce mouvement qui prend ici une telle ampleur, qui emporte avec lui tant d'esprits, et qui envahit tant de domaines ? Il n'est jamais vain, le labeur par lequel on fouille le sol, soit pour y déposer la bonne semence, soit pour en extirper une plante vénéneuse.

 

Le féminisme dont nous recherchons les causes, n'a pas surgi tout seul, et par une sorte de génération spontanée. Il est éclos de deux négations, et de deux penchants mauvais : de la négation de l'autorité, et de celle de la disparité, dans le corps social ; du penchant de la présomption, et de celui de l'orgueil.

 

Le libre examen, posé en principe par la Réforme, a répandu sur le monde un large souffle d'agitation et d'indépendance. Tous les pouvoirs sociaux en ont été ébranlés. De là datent les luttes et les triomphes de l'individualisme, dans les pays protestantisés d'abord, puis dans certaines classes des pays catholiques plus atteintes par l'esprit nouveau.

 

En ces zones malheureuses, les croyances fondées sur l'autorité divine, ont fléchi. L'Eglise n'a plus eu sur la pensée de l'homme, ni sur celle de la femme, cette prise profonde qui lui assurait le contrôle souverain des consciences. L'homme, le premier, a secoué le joug des dogmes, le joug des préceptes issus de la foi, et d'où naissaient pour lui, pour le sexe le plus fort, à l'endroit du sexe le plus faible et le plus digne de tous les respects, d'impérieux devoirs. Victime du scandale, du désordre, de l'infidélité, la femme à son tour s'est raidie contre le sort qu'on lui faisait, et elle s'est abandonnée au rêve d'une destinée où rien, dans la société, ne gênerait ses désirs et ne heurterait son élan.

 

De ce jour, l'autorité maritale n'était plus. Toutes les autorités sont solidaires. Et si la première, celle de Dieu, est méprisée ou mise en doute, les puissances secondaires et subordonnées qui s'y appuient, chancellent. Et lorsque, dans la famille, il arrive que l'époux perde l'ascendant qui en faisait un chef obéi et vénéré, deux pouvoirs rivaux se dressent sous le même toit. La femme joue à l'homme. Elle revêt une personnalité qui n'est pas la sienne, et cela en dépouillant ce juste sentiment de soi, cette conscience de ses devoirs, de son rang, et de sa condition, qui seul peut maintenir l'ordre et la paix.

 

C'est le renversement de la tradition.

 

Nos moeurs chrétiennes, façonnées par l'Eglise et nées de son action la plus intime et la plus profonde, entourent le sexe féminin comme d'un rempart : rempart de foi, de grâce, de modestie, de retenue, de délicatesse, de tout ce qui fait la beauté morale de la femme, et de tout ce qui l'ennoblit à nos yeux. La femme, d'après l'idéal des siècles chrétiens, est une oeuvre de choix, le chef-d'oeuvre des mains divines qui, en créant des soeurs, des mères, des épouses, ont sculpté dans le marbre humain, avec un art infini, les vertus les plus pures, les physionomies les plus douces, les vies les plus humbles et les plus dévouées. L'esprit d'indépendance brise ce chef-d'oeuvre. Il défigure le type féminin que nous a légué le christianisme, et il y substitue un être nouveau, un type à part, le plus singulier mélange de faiblesse et d'audace, d'aménité et d'excentricité, une créature androgyne.

Cette bâtardise ne va pas sans une grave confusion d'idées. On proclame l'égalité de l'homme et de la femme, et on construit là-dessus le plus fragile des échafaudages. Or, « la question n'est pas de savoir si l'homme et la femme sont égaux, mais s'ils sont semblables. » (3) L'égalité, quelle qu'elle soit en face de Dieu, n'implique nullement la parité des rôles dans la société. On oublie que la femme, par son sexe même, par sa conformation physique et ses qualités morales, par ses goûts, ses talents, ses tendances, diffère absolument de l'homme, et que de cette différence radicale entre les sexes résulte une différence non moins grande dans les fonctions.

Fût-il même prouvé, écrit un professeur français (4), que le sexe féminin est aussi capable que le nôtre en toutes les choses de l'intelligence, il resterait que la femme n'en est pas moins femme, que l'homme n'en est pas moins homme, que chacun d'eux est voué à des fonctions physiologiques absolument incommunicables et muni conséquemment d'aptitudes forcément personnelles. De par la nature, l'homme a un rôle propre, la femme en a un autre ; et quelles que soient les atténuations possibles de leurs différences organiques et de leurs disparités mentales, on ne saurait concevoir, fût-ce dans l'infinie profondeur des siècles, ni anatomiquement, ni intellectuellement, une parfaite égalisation des sexes (5). A supposer même que l'homme et la femme en arrivent un jour à ne plus former qu'un seul être, identique d'esprit et de corps, — ce qui serait monstrueux, — il faudrait en conclure qu'en ce temps-là l'humanité cessera d'exister.

 

Le mépris de l'autorité, l'oubli de la disparité des sexes, sont donc bien les causes fondamentales d'où est sorti le féminisme. Ces causes sont fortifiées par le concours qu'elles ont reçu des penchants qui sommeillent au fond de tout être humain.

 

Qui n'a pas son grain d'ambition, son instinct de présomption ? C'est une pente où la chute est facile. Et cette chute se produit avec d'autant plus d'éclat, et un dérèglement d'autant plus grave, que l'homme s'écarte davantage des cadres naturels de son action.

 

On appelle présomption, dit saint Thomas (6), le fait de s'insurger dans ses actes contre l'ordre établi par la nature, et de s'assigner une mission trop haute, des opérations trop ardues, et en désaccord avec les facultés dont on est doué.

 

L'humeur présomptueuse compte pour beaucoup dans le mouvement féministe. La femme nouveau genre aspire à remplacer l'homme ; elle prétend du moins rivaliser avec lui dans tous les domaines de l'activité publique. Elle ne se demande pas comment elle est faite, ni ce que le Créateur attend d'elle, dans les limites où sa providence l'a placée. Elle refuse d'admettre des limites, et son regard curieux, sa pensée inquiète et pleine de désirs, vise tous, les buts, et embrasse tous les horizons.

 

Elle jalouse les succès de l'homme, les triomphes de la virilité. Non contente de la sphère où elle domine elle-même, et de ses propres triomphes dont l'homme est incapable, elle ambitionne la supériorité masculine, comme si sa tête soigneusement ajustée, était faite pour toutes les couronnes. On ne pousse pas plus loin l'orgueil.

 

Nous ne disons pas que toutes les femmes, prises du mal féministe, vont jusqu'à cette folie. Le féminisme a ses degrés ; et il se nuance de toutes les couleurs que revêt l'envie de paraître, l'ambition de se distinguer, et de provoquer l'éloge flatteur et la réclame tapageuse. Il varie et s'intensifie selon la culture qu'il reçoit.

 

II

 

Cette culture se fait de plusieurs manières : par l'éducation que l'on fausse, par la propagande que l'on active, par les écrits que l'on répand, par l'atmosphère toute spéciale que la femme respire.

 

C'est fausser l'éducation féminine que de faire passer l'intelligence de la femme par tous les replis du moule où se forme l'intelligence de l'homme.

 

Il n'y a point entre l'homme et la femme simple égalité de capacité intellectuelle (7), parce que, si éminents qu'on les suppose tous deux, leur valeur respective gardera toujours un cachet propre qui les distinguera l'un de l'autre, de même qu'un homme et une femme peuvent être beaux dans leur genre, sans pour cela qu'ils le soient de la même façon ... Mais s'il n’y a point, d'homme à femme, identité ou même égalité de puissance mentale, il y a équivalence d'utilité intellectuelle entre les sexes. Seulement, cette équivalence même suppose chez l'un et chez l'autre une certaine diversité de dons, d'aptitudes et de facultés. A se trop ressembler, ils finiraient par se moins rechercher. (8)

 

Voilà des principes dont il faut tenir compte dans l'élaboration des programmes d'enseignement féminin.

 

La première qualité de cet enseignement, c'est d'être approprié au caractère physique et moral de la femme, à ses talents naturels et à son rôle primordial. « La science des femmes, comme celle des hommes, dit Fénelon, (9) doit se borner à s'instruire par rapport à leurs fonctions. La différence de leurs emplois doit faire celle de leurs études. » Toute instruction propre à détourner la femme de sa voie, est funeste. Sa Sainteté Benoît XV l'écrivait récemment (10) : « Combien y a-t-il de femmes qui, se livrant outre mesure à des études trop étrangères à leur sexe, prennent des manières toutes masculines ; ou qui désertant les devoirs domestiques pour lesquels elles étaient faites, se lancent témérairement au milieu des luttes de la vie ! De là cette déplorable perversité des moeurs, que la licence même de la guerre a extraordinairement accrue et propagée. »

 

Cela certes ne veut pas dire qu'il faille bannir des maisons d'instruction féminine les études sérieuses. Il s'agit de les bien choisir. Ce ne sont pas les femmes frottées de grec et d'hébreu qui répareront les brèches faites à la famille. Les Paula et les Eustochium, versées dans les commentaires bibliques, ne sont que des exceptions, très belles il est vrai, à la règle générale. Mais en dehors de certaines études, trop abstraites, qui siéent davantage aux esprits masculins, quel vaste champ de culture s'ouvre à l'intelligence de la femme !

 

D'abord, la religion. On ne saurait mettre trop de soin, par de claires et fortes leçons apologétiques, à développer et à affermir les principes et les convictions qui font les mères de famille véritablement chrétiennes. La femme, selon l'expression de Etienne Lamy, (11) « est la réserve religieuse du genre humain. » C'est par elle que commence l'orientation morale des enfants. « L'éducation des enfants, voilà l'oeuvre immense, voilà le chef-d'oeuvre permanent de la femme. (12) » Une femme bien instruite des vérités théoriques et pratiques de sa religion, peut soutenir la vertu naissante de ses fils, la foi défaillante de son époux, et de tous ceux que son charme attire, et qui fréquentent ses salons.

 

Il nous semble désirable que, dans l'instruction des femmes, on évite également l'insuffisance ou l'anémie des programmes, et la congestion désordonnée des matières qu'on y entasse. Trop de science ruine les cerveaux. Un enseignement trop maigre, et des études sans relation avec le besoin des élèves, ne portent pas les fruits qu'on espère..

 

D'après saint Thomas d'Aquin, les mariages bien assortis sont ceux « où il y a convenance entre les époux (13). » Le niveau intellectuel des jeunes filles doit donc s'élever avec le niveau professionnel et social des jeunes gens qui leur seront unis. Et il faut entendre par là, non l'identité de l'instruction, mais la proportion des connaissances. Sur un fond commun de notions générales où entrent, en premier lieu, le catéchisme, la langue maternelle, l'histoire du pays, la tenue d'une maison, doivent s'adapter pour nos étudiantes, des études propres à leur état social respectif. La future maîtresse d'un foyer terrien ne se prépare pas, en tout point, par les mêmes leçons que la femme d'un haut magistrat. Rendons ici hommage aux esprits clairvoyants qui ont perçu la nécessité, pour toutes nos familles, d'écoles ménagères spéciales ou d'un bon enseignement ménagers, et qui ont enrichi notre domaine scolaire de si utiles fondations.

 

Nul n'a mieux compris le caractère véritable de l'instruction qui contient aux filles, que l'illustre Fénelon. Et avec combien de raison cet éducateur expérimenté et sagace, pour mieux définir le caractère de l'instruction féminine, a écrit (14) :

 

Ne sont-ce pas les femmes qui ruinent ou qui soutiennent les maisons, qui règlent tout le détail des choses domestiques, et qui par conséquent décident de ce qui touche de plus près à tout le genre humain ? Par là elles ont la principale part aux bonnes ou mauvaises moeurs de presque tout le monde. Une femme judicieuse, appliquée et pleine de religion, est l'âme de toute une grande maison ; elle y met l'ordre pour les biens temporels et pour le salut. Les hommes mêmes qui ont toute l'autorité en public, ne peuvent par leurs délibérations établir aucun bien effectif, si les femmes ne leur aident à l'exécuter.

 

On peut conclure de ces paroles, que la doctrine traditionnelle, dont nous nous faisons l'écho, laisse une place très large au rôle des femmes, et que, pour préparer ce rôle salutaire, elle ne supprime, dans les écoles, ni objets d'études, ni méthodes, ni mesures, qui peuvent en grandir le sens, et en accroître l'efficacité.

 

Tradition n'est pas immobilisation. L'Eglise est conséquente en se montrant partout sagement progressive. Nulle part en dehors d'elle, l'on n'accueille avec plus de joie et l'on ne favorise avec plus de zèle, tout ce qui peut améliorer l'instruction, celle des femmes comme celle des hommes (15). Nos programmes d'enseignement, souvent remaniés et commentés avec compétence (16), témoignent ouvertement ce souci. La pédagogie canadienne est en bonne voie. Nos écoles normales de garçons et de filles font une oeuvre solide et justement réputée.

 

Cette oeuvre serait-elle meilleure si, comme les féministes le veulent, on pratiquait, pour l'adolescence, la coéducation des sexes ?

 

L'expérience de cette méthode a été faite dans notre libre, très libre Amérique. Aussi les Etats-Unis sont-ils devenus la terre classique des garçonnières. La morale que l'on y observe en est-elle plus pure ? et les liens de la famille en sont-ils plus durables ? et l'instruction commune, départie par ce système, initie-t-elle plus efficacement la femme à l'intelligence et à l'accomplissement de tous ses devoirs domestiques et sociaux ?

 

Le publiciste renommé qu'était Claudio Jannet, a fait de cette question une étude sérieuse. Ses conclusions ne s'accordent guère avec les prétentions féministes (17). Pour lui, la coéducation est déplorable, non seulement sous le rapport moral, mais encore au point de vue intellectuel et social. « Sous prétexte que l'intelligence des femmes vaut celle des hommes, on leur fait étudier le grec, l'algèbre, la mécanique et les hautes sciences. Le résultat de ces études est absolument nul ; » et « le fruit de cette éducation est de dégoûter profondément les femmes des soins du foyer domestique et des fonctions pour lesquelles la nature les a créées. » — Un autre écrivain laïque, M. Turgeon, que nous avons déjà cité, estime de son côté « que, dans la période moyenne, correspondant aux études secondaires, la coéducation est mauvaise, irrationnelle, antipédagogique (18).

 

Le féminisme, pourtant, fait son chemin. Toutes les voix d'une réclame active et organisée s'emploient à hâter sa marche. D'une rive de l'océan à l'autre, ces voix se répondent et se soutiennent. Le féminisme français ne montre pas moins d'ardeur que celui d'Amérique. « Depuis quelque temps surtout, il multiplie les conférences, les publications, les groupements, les associations et les congrès. Nous avons aujourd'hui une propagande féministe, une littérature féministe, des clubs féministes, un théâtre féministe, une presse féministe et, à sa tête, un grand journal, la Fronde, dont les projectiles sifflent chaque jour à nos oreilles. On sait enfin que le féminisme a ses syndicats et ses conciles, et que, chaque année, il tient ses assises plénières dans une grande ville de l'ancien et du nouveau monde. Il est devenu international. (19) »

C'est ce qui se passait avant la guerre. Ce travail de propagande, entravé par l'immense conflit, ne tardera pas sans doute à se poursuivre, d'une façon plus active encore.

 

Le mouvement féministe s'apparente, sur plus d'un point, au mouvement socialiste, et la fortune de l'un fait le succès de l'autre. Les socialistes les plus hardis figurent, en tout pays, parmi les tenants les plus résolus des revendications féminines. Leurs livres propagent le poison, et en infectent les classes sociales les plus accessibles aux propos frondeurs et aux promesses révolutionnaires. D'autres écrivains, sans aller aussi loin, professent des doctrines qui flattent l'orgueil des femmes, et qui sèment et nourrissent et développent en leur esprit des illusions dangereuses.

 

Ces idées, grosses d'espoirs trompeurs, tombent en des cerveaux déjà remués par le choc des conditions économiques modernes.

 

L'industrie et le commerce dépeuplent beaucoup de foyers. Moins protégées par la vie de famille, les filles et les femmes subissent peu à peu l'influence des milieux vers lesquels l'appât du gain, ou la loi du travail, ou la force de l'exemple, les entraîne. Ces milieux sont très mêlés. Des rencontres se font, des conversations se tiennent, des contacts s'établissent, d'où naissent dans le coeur féminin des aspirations nouvelles. On veut améliorer son sort : on veut réduire la somme des maux que l'on souffre, et s'assurer une part plus large des félicités communes. Et le féminisme se présente aux yeux éblouis comme une admirable panacée.

 

Telles sont les causes par lesquelles s'explique, s'entretient et se propage, en Europe et en Amérique, le mouvement destiné, selon le mot de ses auteurs, à émanciper la femme, et qui produit chez les penseurs chrétiens, les sociologues, et les chefs de l'Eglise, une anxiété profonde.

 

Ce n'est pas chose facile d'enfermer dans des limites précises le jeu complexe et l'étrange poussée des revendications féminines. Prêcher l'uniformité des droits dans l'égalité des sexes, c'est pousser l'ambition de la femme jusqu'à l'extrême, et faire de la compagne de l'homme, sur tous les théâtres où l'homme figure, son irréductible rivale.

 

Il semble, cependant, qu'en étudiant cette rivalité sous les trois aspects principaux qu'elle revêt, c'est-à-dire dans l'ordre domestique, politique et social, on puisse se faire une idée suffisamment complète des diverses manifestations du féminisme.

 

Nous ne nous attarderons pas à démontrer tout ce qu'il y a d'abject, d'immoral et de subversif, dans la doctrine de ceux, hommes et femmes, qui rejettent l'institution du mariage, et qui préconisent l'union libre.

 

A défaut de sens chrétien, le sens humain, même le moins affiné, proteste contre cette théorie où le roi de la création est ravalé au rang des bêtes. Le matérialisme, qui ne croit ni aux sanctions de Dieu ni aux destinées de l'âme, et qui enseigne la promiscuité évolutive des espèces, se montre fidèle à lui-même en répudiant l'union stable et sacrée des époux. Une liaison à vie s'accorde mal avec la licence effrénée de l'instinct et le culte brutal et fantasque de la passion.

 

Dans nos modernes sociétés, l'union libre a ses tenants. Un philosophe anglais n'a pas craint de jeter aux foules cette parole, que le mariage n'est qu'une forme de la servitude ; et des milliers de jeunes personnes, impatientes de tout joug, et ignorantes de tout précepte religieux, l'ont recueillie pour en faire la règle de leurs actes et l'évangile de leur vie. Ce féminisme radical n'est pas le plus commun. Mais il progresse chaque jour, dans l'un et l'autre monde, et il grossit ses rangs de toutes les recrues que lui apporte le flot montant des mauvaises moeurs, du libertinage, et du divorce.

 

Au fond, c'est le triomphe de la morale du plaisir sur celle du devoir. Et le mépris grossier de l'institution matrimoniale voulue par Dieu lui-même, ne peut trouver de contrepoids que dans l'exacte notion des destinées de l'homme, et des principes souverains par lesquels la vie humaine est régie.

 

On invoque, pour légitimer de si audacieuses libertés, la voix de la nature. Et l'on ne distingue pas entre la nature simplement animale, et la nature raisonnable à laquelle, chez l'homme, l'animalité est soumise. L'union libre se condamne par la gravité même des suites qu'elle engendre. Non seulement elle asseoit le bonheur de l'individu sur une base fragile et croulante, mais elle mine la famille dans ses principes mêmes ; elle sacrifie à des vues égoïstes la perpétuation de l'espèce, ou du moins l'éducation des enfants ; et, par son exemple, son impudeur, ses désordres, elle porte à la vie de la société une atteinte funeste.

 

Faible encore est le nombre des théoriciens assez hardis pour ériger en système cette pratique sensuelle et libertaire. Le féminisme le plus dangereux n'est pas celui qui arbore un drapeau trempé dans la boue, mais cet autre dont le programme, tout en écartant de telles horreurs, réclame la réforme du mariage et l'émancipation domestique de la femme.

 

La femme, pour ces féministes soi-disant modérés, n'a pas au foyer la place qui lui appartient. Les lois, disent-ils, s'unissent à la tradition pour la reléguer dans l'ombre d'une demeure où elle gémit sous l'empire de la plus rigoureuse vassalité. En droit, elle est l'égale de l'homme. En fait, elle rampe à ses pieds. On voudrait un remaniement de l'état matrimonial qui rétablit, entre les deux sexes, l'équilibre rompu par la prédominance du sexe fort.

 

Ces plaintes sont-elles fondées ? et ne procèdent-elles pas, plutôt, d'une conception très fausse des éléments nécessaires à la constitution du groupe familial ? Que dire d'une société où personne, juridiquement, ne gouverne ? La famille peut-elle échapper à cette loi profonde de la coordination des droits et de la hiérarchie des pouvoirs ? Un corps sans tête n'est pas un être normal, mais un monstre.

Saint Paul n'a fait que sanctionner, de sa haute autorité apostolique, cet axiome, lorsqu'il a écrit « que l'homme est le chef de la femme (20) » et qu'il faut « que les femmes obéissent à leurs maris comme au Seigneur (21). » L'Apôtre justifie ce précepte, en rappelant que « l'homme n'a pas été tiré de la femme, mais la femme de l'homme, » et que « l'homme n'a pas été créé pour la femme, mais la femme pour l'homme (22). » En d'autres termes, la manière dont la femme a été créée, et le rôle d'auxiliaire pour lequel elle a été faite, sont une double preuve de la dépendance féminine.

 

Dépendance, d'après saint Thomas d'Aquin, tellement naturelle, et tellement conforme aux exigences de l'ordre, que, même dans l'état d'innocence, elle eût marqué les rapports de l'époux et de l'épouse. L'homme, en vertu de sa constitution, et par un effet des propriétés de son intelligence et de sa raison, se montre, d'ordinaire, plus apte que la femme à tenir, dans la famille, les rênes du commandement. (23)

 

Nous disons « d'ordinaire », car il arrive sans doute, et cela plus d'une fois, que le sceptre tombe, des mains impuissantes d'un mari sans talent ou sans volonté, dans celles de sa compagne. Ce sont là des cas spéciaux ; et, quel qu'en soit le nombre, ils demeurent à l'état d'exceptions et n'infirment nullement les conclusions d'une thèse générale.

 

Notre loi civile est ici d'accord avec la théologie. Elle décrète (24) que « le mari doit protection à sa femme, et la femme obéissance à son mari ». C'est la formule très brève, mais très nette et très juste, où se résume la charte matrimoniale. Substituez à ce mode antique du mariage chrétien le régime égalitaire : « C'est une guerre de sécession qui commence. Que le rêve des libertaires vienne à se réaliser, et le mariage sera le rapprochement ou plutôt le conflit de deux forces égales, avec plus d'orgueilleuse raideur chez la femme et moins d'affectueuse condescendance du côté de l'homme.

 

Et quand ces deux forces, rapprochées par une inclination passagère, se heurteront en des luttes que nulle autorité supérieure ne pourra trancher, il faudra bien rompre, puisque personne ne voudra céder. Pauvres époux ! pauvres enfants ! pauvre famille (25) ! »

 

La puissance maritale, sous laquelle le droit place la femme, est sujette, nous l'avouons, comme toutes les puissances humaines, à des écarts et à des abus. La rudesse, l'inconduite, l'irréligion de certains maris, amassent sous le toit familial bien des nuages, et font couler des yeux et du coeur des épouses bien des larmes. Autorisent-elles les réclamations anarchiques du féminisme ? Le remède serait pire que le mal. Ce qui importe et ce qui est possible, c'est plutôt de protéger la femme, par des moyens appropriés, contre les excès du pouvoir auquel la nature l'a soumise.

 

Nulle influence, dans ce domaine, n'est comparable à celle de l'Eglise.

 

L'Apôtre, qui, tout à l'heure, posait le principe de l'autorité de l'homme dans la famille, prend bien soin d'établir, à côté des droits masculins, les devoirs : « Vous, maris, écrit-il, (26) aimez vos femmes, et ne soyez point rigoureux envers elles. » Ce que saint Pierre prescrit non moins expressément (27) : « Vous, maris, montrez de la sagesse dans vos relations avec vos femmes, comme avec un sexe plus faible, les traitant avec honneur, puisqu'elles sont, aussi bien que vous, héritières de la grâce de la vie ». En effet, dans l'ordre des mérites surnaturels, les divergences de nature s'effacent : « Il n'y a plus ni juif, ni gentil, ni esclave, ni libre, ni homme, ni femme ; vous êtes tous un en Jésus-Christ (28) ».

 

Cette unité devant Dieu, née de la même foi, de la même rédemption, des mêmes spirituelles destinées, crée donc entre les époux une situation qui, sans supprimer les rapports hiérarchiques, ennoblit l'obéissance et tempère l'autorité.

 

L'homme, dit Léon XIII (29), est le chef de la famille, la tête de la femme. Celle-ci, chair de sa chair et os de ses os, lui doit la soumission et l'obéissance, non à la façon d'une esclave, mais comme une compagne digne d'égards et de respects. Que tous deux s'appliquent à bien remplir leurs devoirs mutuels : la charité divine aplanira leur tâche.

 

Que de ménages heureux où l'homme et la femme s'entendent comme la tête et le coeur ! L'homme gouverne, mais avec cette bonté souriante et cette délicatesse de manières qui enveloppent et dissimulent la fermeté du vouloir. Il laisse à son épouse une ample latitude dans tous les champs d'action où brille le talent féminin. La femme use de cette liberté, discrètement, judicieusement, dans l'intérêt de toute la famille. Elle pénètre de son influence le sanctuaire intime où son zèle s'exerce. Elle est l'âme religieuse du foyer. Elle n'hésite point, elle ne recule point devant le devoir maternel. Elle insuffle à ses enfants toutes les ardeurs de l'esprit chrétien dont elle-même est animée, et elle exhale autour d'elle un parfum de foi, de contentement, et de vertu, qui crée et entretient l'atmosphère la plus vivifiante. Ce rôle n'est-il pas suffisamment honorable pour l'associée de l'homme ?

 

L'Eglise, d'autre part, veille avec soin sur toutes les causes qui tendent à troubler la paix des familles. Son action contre les mauvais livres, les mauvais théâtres, les mauvais lieux, est connue ; et, bien loin de se ralentir, elle se multiplie avec les sources du mal. La guerre qu'elle fait à l'alcool, et les oeuvres de tempérance dont elle se montre partout l'initiatrice infatigable, apportent à la femme d'inappréciables réconforts. Quelques réformes dans les lois, touchant la capacité possessoire et administrative des époux, pourraient aussi, d'après plusieurs publicistes chrétiens, améliorer son

sort (30)

 

Améliorer n'est pas détruire. Conservons et sauvegardons l'ordre domestique, et, comme éléments indispensables de cet ordre, l'autorité du mari, la religion des époux, l'équilibre harmonieux de leurs devoirs et de leurs fonctions réciproques.

 

C'est dans cette vue que nous croyons utile, nécessaire même, de faire échec aux ambitions politiques contenues dans le programme féministe.

 

Nous mettons hors de question les quelques femmes illustres poussées sur la scène publique par les événements, et que ces facteurs historiques y maintinrent. Blanche de Castille au Moyen Age, Victoria d'Angleterre dans les temps modernes, sont certes des exemples d'intelligence solide et de valeur gouvernementale qui honorent singulièrement le sexe féminin. Nous ne parlons pas de Jeanne d'Arc dont Dieu voulut choisir la faiblesse pour mieux faire éclater sa force. Ce sont là des cas singuliers et des illustrations brillantes qui montrent jusqu'où certaines femmes peuvent s'élever, par la faveur des circonstances, dans l'administration des Etats. Mais on aurait tort d'en conclure que le régime normal établi dans la société par la Providence, comporte pour la femme des fonctions et des aptitudes politiques.

 

Le rôle politique de la femme peut s'entendre aujourd'hui de deux manières : dans le sens électoral, et dans le sens parlementaire.

 

La plupart des avocats du féminisme hésitent encore à acheminer des mères, des soeurs, des épouses, vers la conquête d'un siège au parlement. L'éligibilité des femmes compte moins de partisans que l'électorat, parce qu'elle heurte plus directement, plus ouvertement, la tradition. C'est un changement plus radical dans nos moeurs. La fonction de député est plus haute que celle d'électeur ; elle implique des responsabilités plus graves, des occupations plus absorbantes, et elle répugne d'une façon plus visible aux talents et aux devoirs féminins. Il se trouve, malgré cela, des femmes qui aspirent à tenir une place dans l'enceinte des législatures, et dans le conseil des nations. Nous croyons même que ce phénomène de la femme-député, s'est en effet réalisé. Le plus souvent, néanmoins, dans les cercles féministes, on se contente de revendiquer ce que l'on appelle, sans l'ombre d'une hésitation, le « droit » électoral de la femme.

 

Ce droit existe-t-il ? Et, s'il n'existe pas, convient-il que les parlements le concèdent ?

 

Quelques auteurs s'autorisent de la prétendue souveraineté du peuple pour arguer que la femme, de par la nature même, peut réclamer le droit de vote dans toutes les élections populaires. Cet argument, pour nous, est sans valeur. Nous estimons la thèse du peuple souverain (31) fausse et dangereuse, opposée aux meilleures doctrines philosophiques, comme aussi aux enseignements très formels de Léon XIII.

 

Là même où le suffrage universel des hommes est en vigueur, ce système fonctionne, non pas parce qu'il est une forme nécessaire et obligée du droit naturel, mais parce que, dans ces pays, le régime démocratique auquel les citoyens sont soumis, s'est organisé sur la base d'une participation très large des classes populaires aux affaires de l'Etat. C'est un élément variable et contingent. Le suffrage des hommes, quelque étendu qu'il soit, n'entraîne donc pas logiquement celui des femmes. La Cour suprême des Etats-Unis a rendu, à ce sujet, le 4 octobre 1875, une décision très significative. Des femmes du Missouri, à qui les cours de cet Etat avaient refusé le droit de vote, en avaient appelé de ce jugement au tribunal souverain de l'Union. Elles s'appuyaient sur leur titre de citoyens américains. Les juges, dans leur réponse, firent cette déclaration : « Depuis près de quatre-vingt-dix ans, le peuple a vécu sur l'idée que la Constitution, quand elle confère le droit de citoyen, ne confère pas pour cela nécessairement le droit de suffrage. Si une pratique uniforme longtemps continuée peut établir la vraie portée d'un document aussi important que la Constitution des Etats-Unis, assurément c'est ici le cas (32). »

 

Est-il, au moins, désirable que le droit de suffrage politique, dans la mesure où la loi l'accorde aux hommes, soit de même octroyé aux femmes ?

 

Dans un grand nombre de pays, l'une des innovations les plus ardemment réclamées par les champions du féminisme consiste précisément dans la sanction légale du suffrage politique féminin. Cette extension du droit de vote est en voie d'exécution aux Etats-Unis, en Australie, au Danemark, en Norvège (33). Elle a été décrétée très récemment en Angleterre. Ailleurs, suffragistes et suffragettes battent la caisse avec entrain. Sous l'empire des idées et des méthodes protestantes, et, pour n'être pas en reste de ferveur démocratique, le Canada, lui aussi, a emboîté le pas aux Etats réformateurs ; et, il y a quelques mois, notre parlement fédéral votait, non sans opposition de la part de plusieurs députés (34), une loi reconnaissant aux femmes, et aux parents des soldats, dans les élections politiques, le droit de suffrage.

 

Cette législation nouvelle a créé, parmi les catholiques canadiens, une impression fâcheuse. Elle blesse leurs sentiments sur la femme et sur sa mission.

 

La femme, en général, spécialement la femme chrétienne travaillée avec tant de soin, et depuis tant de siècles, par les mains de la religion, ne nous semble pas faite pour l'arène politique. Son sexe même où vibrent les plus généreux instincts de notre nature, et où s'incarnent la douceur aimable et la bonté pacifiante, l'éloigne des querelles de la tribune et du tumulte de la place publique. Les luttes politiques passionnent les hommes et les divisent. Et c'est au contraire par le moyen des femmes, moins mêlées à ces disputes, plus libres d'opinion, et plus dégagées des contestations irritantes, que souvent les familles rivales se rapprochent. Moins la femme se commet dans la poussière de la rue et la mêlée des partis, plus sa personne s'impose à la considération publique, en même temps que sa mission se poursuit dans toute sa sereine beauté.

 

Cette mission attache la femme au foyer. Là son empire se fonde ; là ses talents se produisent ; là sa vertu éclate ; là son influence rayonne. Dieu l'a créée pour des fonctions sans lesquelles la famille ne pourrait vivre, ni l'humanité se perpétuer (35). Tout en elle se mesure, et s'ajuste, et se subordonne à cette vocation nécessaire. Peu versé dans les calculs d'ordre public et d'intérêt gouvernemental où se joue l'intelligence masculine, son esprit très vif, très délié, très minutieux, se tient attentif aux multiples soins du logis. Il suit le progrès des enfants, la croissance de leur corps, le mouvement de leur vie, la formation de leur âme, le développement de leur conscience, et cela avec des lumières, des intuitions et des clairvoyances vraiment admirables, et qui sont le propre des femmes et des mères. La femme est la joie des foyers, le lien des familles, la force des traditions, l'espoir des générations. Là où les lois s'élaborent, elle ne peut être que médiocre. Là où les hommes se font, elle excelle. Elle se montre supérieure, incomparable, dans le milieu où la nature l'a placée, et où tout exige qu'elle soit maintenue.

 

C'est moins, sans doute, une question de doctrine religieuse que de sens catholique et social. De bons chrétiens, quelques évêques même, ont cru sage de ne point condamner le suffrage féminin. Tel n'est pas pourtant, hâtons-nous de le dire, le sentiment général parmi les chefs et les fils de l'Eglise. « La majorité des catholiques, écrit le Père W. Fanning (36), voient d'un oeil défavorable l'activité politique des femmes. »

 

Au premier rang de ces désapprobateurs se trouve le Souverain Pontife lui-même. Benoît XV, dans cette lettre aux Ursulines que nous avons déjà citée, déplore le nombre des femmes « qui désertant les devoirs domestiques pour lesquels elles étaient faites, se lancent témérairement au milieu des luttes de la vie Les luttes politiques ne sont-elles pas les plus opposées aux exigences familiales ? » Il est difficile, déclare le Père Rossler (37), de concilier la participation directe de la femme à la vie politique et parlementaire actuelle avec son devoir prédominant, le devoir maternel. »

 

Les écrivains des Etudes ont consacré à cette question de belles pages. Nous en détachons les lignes qui suivent (38) :

 

On se figure malaisément une femme, jeune fille ou mère de famille, veuve ou suivie de son mari, menant pour son compte une campagne électorale, répondant à des affiches par d'autres affiches, aux journaux par des journaux, rendant injure pour injure, menace pour menace, discutant des programmes dans les réunions, et enfin montant à la tribune du Sénat ou du Corps législatif pour y prononcer des discours, parler pour ou contre la guerre et la paix, traiter à fond la question des douanes et des égouts, renverser des ministères et décider les questions les plus complexes et les plus graves de finances, d'agriculture, de commerce et d'industrie. Quand on annonce une femme qui s'occupe de politique avec passion, on s'attend toujours à la voir avec de la barbe. Les femmes ont une influence considérable, parfois décisive, sur toutes ces affaires ; mais à condition de ne pas agir directement pour elles-mêmes et en ne se montrant pas trop.

 

Parmi nous, la question du suffrage des femmes s'est posée, nous l'avons dit, tout récemment. A part ceux de nos députés qui appuyèrent de discours très sensés leur vote contre la proposition de loi électorale soumise aux Chambres canadiennes par le ministère unioniste, la Revue Canadienne (39), par la plume de l’hon. M. Chapais, s'est élevée avec force contre le principe de l'électorat féminin. Nos journaux catholiques, entre autres l'Action Catholique, le Droit, le Devoir, ont combattu non moins vivement cette fausse réforme. Mentionnons particulièrement une série d'articles remarquables publiés sur ce sujet par M. Henri Bourassa. Répondant à ceux qui augurent de l'action publique des femmes un grand bien, le vigoureux publiciste écrivait (40) :

 

Indépendamment des ravages exercés dans la famille et dans la société par le féminisme, il n'est rien de moins certain que les femmes électrices ou candidates apportent une amélioration au ton général de la politique. La moralité de la femme, supérieure à celle de l'homme dans la vie privée, quand elle est soutenue par la maternité, n'est ni plus forte ni plus sûre que celle de l'homme en fonction des affaires publiques. La plus grande émotivité de la femme, l'empire tyrannique que prennent sur son esprit ses sympathies et ses antipathies instinctives, l'hypnotisation qu'exerce sur toutes ses facultés l'objectif réel ou imaginaire de sa passion — être, chose, idée, ou simple illusion — moins variable qu'on ne le pense, unique en tout cas, tant que dure l'obsession, enfin, son extraordinaire intuition des détails, toutes facultés précieuses dans les sphères où la femme est chez elle, la rendent au contraire plus incapable que l'homme, si infirme qu'il soit, d'envisager les situations d'ensemble, de subordonner le particulier au général, de sérier et de hiérarchiser les questions ; et c'est tout cela qu'exige avant tout la science du gouvernement des sociétés.

 

Dans une lettre doctrinale à ses prêtres, le vénérable Evêque de Chicoutimi (41) a résumé toute cette question en quelques mots aussi justes qu'autorisés :

 

C'est une erreur d'arracher la femme à son foyer pour la jeter dans l'arène politique. La politique n'y gagnera rien, et les femmes y perdront, avec le temps nécessaire pour soigner leur ménage et bien élever leurs enfants, le prestige délicat dont elles jouissent et qui les entoure d'une si haute estime. Le suffrage féminin nous paraît l'un des plus sûrs moyens de découronner la femme, de désorganiser la famille, et de compromettre l'avenir de la jeunesse chrétienne. (42)

 

Ajoutons que le droit de suffrage, accordé à une classe de personnes, doit être regardé, pour elles, comme un premier pas dans la voie qui mène au parlement. Après s'être employé quelque temps à pousser le char politique, on éprouve l'ambition d'y monter. Beaucoup de féministes redoutent l'éligibilité des femmes. Ils seraient conséquents, s'ils dissuadaient ces dames de convoiter l'accès aux urnes, et s'ils persuadaient les législateurs de leur en fermer le chemin. (43)

 

Le féminisme ouvre à la femme non seulement la carrière politique, mais toutes les carrières civiles. Il l'installe un peu partout ; il la revêt de la toge des légistes ; il la couvre du bonnet des docteurs ; il ose l'introduire dans les rangs ecclésiastiques ; il n'hésiterait même pas à lui proposer de changer le mantelet pour la cotte de mailles.

 

Le principe de l'égalité des sexes, par sa portée logique, conduit fatalement à l'identité de toutes les fonctions.

 

Nous ne pouvons, certes, pas faire grief aux filles et aux femmes que presse le besoin de vivre, de franchir, lorsqu'elles y sont contraintes, le seuil du foyer, et d'aller chercher dans les bureaux publics, dans les établissements médicaux, dans l'industrie et le commerce, un emploi lucratif. Certaines nécessités créées par les conditions modernes de l'ordre économique et social, parlent plus haut que les plus hautes raisons de tradition et de convenance. Nous pouvons les déplorer (44), nous ne pouvons malheureusement les supprimer. Mais encore faut-il que, dans ces situations, les exigences de la loi morale soient respectées. L'organisation et la distribution du travail doivent se faire de telle sorte que ni la vertu des filles, ni l'honneur des épouses, ni la santé des mères, ne soient mis en péril. Il importe pour cela d'établir une surveillance active, de prévenir, autant que possible, les contacts dangereux, de préposer des femmes à la direction des départements féminins (45).

 

L'on formule, contre l'insuffisance de certains salaires d'ouvrières et de petites employées, des plaintes très vives ; mais le féminisme porte plus loin ses ambitions et ses rêves, et ce n'est pas sans quelque succès.

 

De fait, plusieurs pays (sans excepter le nôtre) ont levé la barrière légale qui interdisait aux femmes l'entrée des carrières libérales (46). Aux Etats-Unis, dans l'espace de vingt ans, le nombre des femmes-médecins et chirurgiens s'est accru de plus de quatre mille. « Ces dames ont forcé même les portes du sanctuaire. En ce pays de la Bible, malgré la défense de saint Paul, voici que les femmes prêchent, officient au temple, et dirigent la Congrégation (47). » Nous sommes en face d'une invasion féminine qui dispute au sexe masculin ses positions les plus avancées, et dont le moindre inconvénient consiste précisément dans cette concurrence faite par une moitié du genre humain à l'autre moitié.

 

Disons nettement notre pensée. Aucune raison sérieuse ne nous semble justifier un tel renversement des idées et des pratiques les plus ancrées dans la vie et la conscience des peuples. Eh quoi ! les carrières jusqu'ici destinées aux hommes, ne sont-elles pas suffisamment remplies ? et n'y a-t-il pas, dans les champs d'action et d'émulation propres à la femme, de quoi satisfaire ses plus nobles besoins d'activité intellectuelle, d'initiative, d'ingéniosité, et de dévouement ? La femme, pour se montrer à la hauteur de son rôle, oit-elle modifier son type primitif, et lui faut-il évoluer jusqu'à cesser d'être elle-même ? « Pour être plus homme, qui sait si elle ne sera pas moins femme (49) ? »

 

Sûrement, la famille en pâtira. « Nombre d'Américaines, écrit le Père Burnichon (50), trouvent l'horizon du foyer trop étroit ; ce domaine, où les préjugés d'antan avaient confiné leur sexe, ne leur suffit pas. Toutes ces manifestations de leur activité et de leur hardiesse qui émerveillent nos publicistes, cette ardeur pour les hautes études, et surtout cette invasion dans les places et les carrières plus ou moins réservées jusqu'ici aux hommes, prouve surabondamment que la femme américaine accomplit une évolution du dedans vers le dehors. » Or, ajoute l'auteur, cela « ne vas pas sans détriment pour lefoyer domestique. Le foyer vit par la femme. Qu'elle vienne à manquer, tout se désagrège et se disperse ; il n'y a plus de foyer. »

 

Cet aiguillage de la vie féminine sur des voies où l'homme seul, auparavant, s'engageait, n'est pas sans effrayer ceux qui savent combien la complexion des femmes est délicate. Des écrivains, d'ailleurs sympathiques, croient devoir signaler ce danger : « Que les femmes choisissent bien leur voie ! Plus d'une occupation virile leur serait meurtrière. Qu'elles ne se flattent point d'avoir, en tout et partout, la force de nous imiter, de nous suppléer, de nous évincer sans dommage ! Pour ne parler que des fonctions libérales, douces en apparence et si enviables en fait, sont-elles nombreuses les têtes féminines capables de résister aux fatigues, à l'énervement des recherches et des travaux intellectuels (51) ? »

 

Par son tempérament physique et moral, par la pudeur et la retenue de son sexe, la femme se distingue tellement de l'homme qu'elle ne peut sortir du cadre de ses fonctions sans se faire violence à elle-même. Ni le fracas des batailles, ni les subtilités du barreau, ni l'oeuvre sanglante de la chirurgie, ne conviennent à ses aptitudes. Nous ne contestons pas sa dextérité, et l'opportunité de ses soins, dans certaines branches de la médecine, surtout s'il s'agit de traiter des femmes et des enfants. Aussi voit-on la Providence utiliser ce talent chez les bonnes infirmières laïques, et chez les Soeurs hospitalières appelées par leur vocation au chevet des malades, et au secours des âmes endolories, et qui font de leur travail, non seulement un ministère corporel, mais une oeuvre de charité et de religion.

 

Religion et charité : c'est dans ce double domaine que la femme, tout en demeurant fidèle à sa nature, joue un rôle éminemment social. Beaucoup de femmes chrétiennes, en mettant leurs loisirs au service d'oeuvres religieuses et bienfaisantes, se font une gloire solide et vraie. Depuis le jour où la Vierge Mère collabora à notre rédemption, il semble, dit Ozanam, (52) que « rien de grand ne se soit fait au sein de l'Eglise, sans qu'une femme y ait eu part. » Les martyres, les fondatrices d'Ordres, les reines et les mères célèbres par l'influence conquérante de leurs vertus, remplissent de leurs souvenirs les annales des peuples chrétiens.

 

Le Canada, lui aussi, a eu ses femmes illustres. Sur notre berceau, se sont penchées des héroïnes dont l'histoire garde avec soin les noms et célèbre avec orgueil la mémoire. (53) Nos vierges, si nombreuses, qui marchent sur leurs traces, nos mères si vaillantes qui transmettent le sang des ancêtres et par qui se conservent et se propagent les vertus de la race, n'ont rien à envier aux ouvrières tapageuses d'un avenir féministe.

 

Cet avenir nous paraît plein de dangers. Le vrai progrès n'est pas celui qui s'écarte de la tradition consacrée par la sagesse des siècles. Une nation n'est forte qu'en proportion de ce que vaut la famille ; et une famille ne vaut, et n'a de puissance de vie, que par le respect des lois qui en condition­nent la nature et qui en régissent tous les éléments.

 

(1) Léon XIII, encycl. Arcanum, 10 fév. 1880. — Cf. Et. Lamy, La femme de demain, pp. 62 et suiv.

 

(2) Lettre pastorale (Acta et decreta Conc. Plen. Queb. prim., pp. 502-503).

(3) Henri Bourassa, le Devoir, 30 mars 1918.

(4) Charles Turgeon, Le féminisme français, t. I, p. 140. — L'auteur qui est de Rennes a offert, en 1902, cet ouvrage à l'Université Laval « à l'occasion des fêtes de son cinquantenaire et en souvenir des liens qui unissent les Turgeon de France aux Turgeon du Canada.»

(5) La différence psychologique des sexes est tellement entrée dans nos idées et dans nos moeurs que, quand, par un jeu ironique de la nature, un homme parait avec des allures et des vanités, des cachotteries et des passions féminines, notre bon sens se révolte ou notre gaîté s'amuse.

(6) Som. théol. II-II, q. cxxx, art. 1.

(7) Saint Thomas attribue nettement à l'homme un intellect plus puissant (Som. théol., I, q. XCII, art. 1 ad 2 ; II-II, q. CXLIX, art. 4).

(8) Turgeon, ouv. et l. cit. pp. 196-97.

(9) Traité de l'éduc. des filles (Oeuvres choisies, 2e éd. Saucié, p. 124).

(10) Lettre à la Supérieure Générale des Ursulines, 27 déc. 1917.

(11) La femme de demain, p. 265.

(12) Id. ibid., p. 27.

(13) De l'éducation des princes, liv. V, ch. XXVIII.

(14) Ouv. cit., p. 113.

(15) Voir Règlements et Programmes d'études des Instituts d'enseignement primaire affiliés à l'Université Laval (1916).

(16) Cf. Mgr. F.-X. Ross, Manuel de Pédagogie (1916).

(17) Etats-Unis contemporains (4e éd.) t. I, pp. 244 et suiv. ; t. II, app. p. — Cf. Etudes, 15 avril 1896: La femme américaine par le P. Burnichon.

(18) Ouv. cit., t. I, p. 295.

(19) Turgeon, ouv. et t. cit., p. 5.

(20) 1 Cor., XI, 3.

(21) Epb. V, 22.

(22) 1 Cor. XI, 8-9.

(23) Som. théol., I, q. XCII, art. 1 ad 2.

(24) Code civil, art. 173.

(25) Turgeon, Le féminisme français, t. II, pp. 101-102.

(26) Coloss., III, 19.

(27) 1 Pet., III, 7.

(28) Gal., III, 228.

(29) Encycl. Arcanum, 10 fév. 1880.

(30) Etudes, t. LXVIII, p. 593 ; Turgeon, ouv. et t. cit., 1. II, ch. V, pp. 137 et suiv.

(31) Voir notre Droit public de l'Eglise. Principes généraux, App.

(32) Claudio Jannet, Les Etats-Unis contemporains (4e édi.), t. II, p. 323.

(33) The Catholic Encyclopedia, vol. XV. p. 692.

(34) Cette opposition s'est faite surtout par des députés canadiens-français. — Le vote politique féminin est déjà entré dans la législation de plusieurs provinces en majorité anglaises.

(35) Des économistes, tels que P. Leroy Beaulieu, voient dans le féminisme que nous combattons un péril pour la natalité (cf. Arth. Trahan, Discours sur le suff. des femmes, Ottawa, 11 avril 1918).

 

(36) Catholic Encyclop., vol. XV, p. 696.

(37) Ibid., p. 694.

(38) Tome LXVIII, pp. 582-83.

(39) Livraison de mai 1918.

(40) Le Devoir, 1er avril 1918.

 

(41) Mgr M.-T. Labrecque, Circulaire au clergé, 17 juin 1918.

(42) C'est la thèse contre le suffrage des femmes, considéré d'une manière absolue, que nous croyons devoir soutenir dans cette étude. Mais il y a l'hypothèse où le vote féminin, dans un pays, est légal, et où les femmes mal inspirées s'en servent pour des fins perverses. En ce cas, ne vaut-il pas mieux que les femmes catholiques usent elles-mêmes de leur droit de suffrage et s'efforcent ainsi de neutraliser l'action électorale que l'on redoute ? Plusieurs le pensent, si toutefois l'on peut par là éviter un plus grand mal.

(43) Nous parlons ici de l'intervention des femmes seulement dans le domaine politique ; mais ce que nous y disons peut et doit s'appliquer, quoique d'une façon restreinte, et sauf certains cas particuliers, aux choses municipales et scolaires.

(44) « Il est des travaux moins adaptés à la femme, que la nature destine plutôt aux ouvrages domestiques : ouvrages d'ailleurs qui sauvegardent admirablement l'honneur de son sexe, et répondent mieux, de leur nature, à ce que demandent la bonne éducation des enfants et la prospérité de la famille. » (Léon XIII, encycl. Rerum novarum, 16 mai 1891.)

 

(45) The Cath. Encyclop., p. 694.

 

(46) Ibid., pp. 695-96.

 

(47) Etudes, t. LXVII, p. 544.

 

(49) Turgeon, ouv. cit., t. II, p. 449.

(50) Etudes, t. LXVII, pp. 549-550.

(51) Turgeon, ouv. cit., t. II, p. 455.

 

(52) Dante et la philosophie catholique (5e éd.), p. 388.

 

(53) Voir Les Fêtes du Monument Laval (1908) : Femmes illustres pendant l'épiscopat de Mgr de Laval par l'abbé H.-A. Scott ; et Feuilles volantes et pages d'histoire (1910) par Ernest Gagnon: Madame D'Ailleboust.

Source: Mgr Louis-Adolphe PAQUET, " Le féminisme", dans Études et Appréciations, Nouveaux Mélanges canadiens, Québec, Imprimerie franciscaine missionnaire, 1919, pp. 3-43.

 
© 2005 Claude Bélanger, Marianopolis College