Quebec History Marianopolis College


Date Published:
Septembre 2005

Documents of Quebec History / Documents de l'histoire du Québec

 

Féminisme politique

 

[Ce document date de 1929. Pour la référence précise, voir la fin du texte.]

Depuis quelques années surtout, le mouvement féministe en notre province gagne des adeptes sinon plus sérieux du moins plus remuants. Fédération de clubs féminins, ligue en faveur du suffrage des femmes, résolutions adoptées à l'issue d'assemblées délibérantes, délégations auprès des ministres, on recourt à tous ces moyens pour gagner les politiques provinciaux. Jusqu'à présent, la législature a victorieusement résisté. Voilà un refus qu'il l'honore.

 

En l'occurence [sic], le gouvernement s'inspire d'excellents principes sociaux. L'opposition au projet est d'ailleurs conforme aux opinions de la grande majorité du public. C'est bien assez que le féminisme économique sévisse avec une intensité croissante sans accabler notre organisation sociale d'un mal plus grave. Tel est le féminisme politique. Que les philosophes en discutent les principes, en montrent l'origine historique, recherchent les arguments d'autorité en faveur du vote des femmes, la question étant libre, nous n'y voyons pas d'objection. Cependant, il y a en ce domaine une tradition à respecter. La question de principe résolue, il resterait encore la question d'opportunité. Celle-ci intéresse les philosophes tout autant que les juristes et les sociologues. Or, pour une fois il faut juger le principe d'après ses résultats possibles. Nous ne voyons pas que le féminisme politique puisse apporter à nos familles plus de bonheur, plus d'entente, plus de calme. Au contraire, si la femme veut voter intelligemment — et il est entendu qu'elle votera ainsi, autrement il ne servirait de rien de l'amener aux urnes — il lui faudra consacrer de ses loisirs à des questions étrangères à son rôle. Il deviendra de mode que la femme assiste aux assemblées, où elle ne s'affinera guère; il sera fréquent de la voir aux comités d'où elle ne sortira pas meilleure. Ses opinions politiques ou bien seront celles de son mari, ou bien en diffèreront. Dans le premier cas rien ne sera changé si ce n'est qu'un vote de plus s'ajoutera en faveur d'un candidat. Dans le deuxième cas, on peut deviner les discussions acerbes qu'un époux partisan pourra sans cesse attiser. Que gagneront les enfants au spectacle des parents aux prises?

 

Certes, si la femme veut ajouter à ses soucis d'autres préoccupations qu'elle se dépense, comme l'y invitait Mgr Gauthier lors de la réunion annuelle de l'Assistance maternelle, au service des oeuvres sociales féminines.

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Source: Anonyme, "Le féminisme politique", dans l'Almanach de la langue française, 1929, pp. 72-73.

 

 
© 2005 Claude Bélanger, Marianopolis College