Note
de léditeur : Au printemps de 1896, alors que la loi remédiatrice était
introduite à la Chambre des Communes, lépiscopat québécois discuta fermement
de lattitude quil devait prendre. Mgr Langevin, appuyé par Mgr Laflèche,
était davis que les évêques devaient prendre une position ferme et claire,
appuyant la loi remédiatrice et le Parti conservateur, ou moindre mal, faisant
une obligation aux députés catholiques de voter pour une telle loi. De façon générale,
les évêques du Canada anglais, sauf exception comme Mgr Cameron de la Nouvelle-Écosse,
étaient plus réticents à se mouiller les pieds et à prendre une position si ouvertement
partisane. Cette vision était partagée par Mgr Émard, évêque de Valleyfield, et
par Mgr Fabre, archevêque de Montréal. Dans le document cité ci-dessous, Mgr Émard
exprime ses réticences à Mgr Bégin dans une lettre datée du 23 avril 1896. Selon
Crunican, p. 261, les initiales L. L. G. P. et M. réfèrent à Wilfrid Laurier,
Charles Langelier, Alphonse Geoffrion, Charles Pouliot ou Joseph R.-F. Préfontaine,
et Dominique Monet. « Il est uniquement
propre à jeter, une fois de plus, le discrédit sur la personne des évêques, dont
la parole, malheureusement réputée partisane, sera discutée, servant dappui
pour les uns et de prétexte aux insultes des autres. Il ny a moyen de faire
croire quun tel document serait indépendant des partis; et je ne puis faire
acte de foi dans aucun deux. Il faut nous ménager une position tenable et
honorable, pour le cas très possible, ou nous devrons nous présenter, comme pétitionnaires,
devant un gouvernement composé des adversaires daujourdhui. Les parlements
changeront; notre droit, mème dans lhonorabilité des revendications, doit
demeurer intact et indéfini, jusquà victoire complète. Je ne suis pas convaincu,
comme évêque, que la passation dune loi rémédiatrice par le Parlement dOttawa,
soit le moyen unique, sur et prompt de rendre justice à la minorité Manitobaine;
avec une majorité de 40, le parlement actuel na pas pu réussir. Sil
avait réussi, il restait à appliquer la loi au milieu des difficultés encore plus
grandes, sous un gouvernement hostile; et si elle était mise en pratique, on gardait
les moyens de la rendre passablement illusoire (...) Dès lors, faut-il par un
langage absolu, fermer toute issue à dautres modes de règlement possibles,
peut-être même plus faciles dans des circonstances données? Le mandement projeté
rencontrera une opposition formelle chez un grand nombre, non seulement de protestants,
mais même de catholiques, qui ny verront quune tyrannie électorale;
il est connu que des politiciens travaillent à obtenir ce document. Est-il de
bonne conduite administrative de mettre les fidèles dans le cas certain de nous
désobéir, de désobéir à lÉglise sans lespoir fondé dun bien
général plus considérable que le mal? Car, et ceci est sérieux, supposons que
le mandement produise tout son effet chez les catholiques, croyez-vous quil
empêchera lélection de L.L.G.P. et M.? Non; or il ne reste que trois ou
quatre candidats qui hésiteront à faire une promesse quils trouveront bien
dure et bien compromettante pour la dignité dun député. Tout le mandement
collectif qui met en jeu, dune manière presque décisive, lautorité
et le prestige temporel des évêques, naurait dapplication que pour
trois ou quatre. Cest trop peu, en prévision des conséquences trop graves. » | Note
from the editor: In the spring of 1896, as the Remedial Bill was being introduced
in the House of Commons, the Quebec episcopate sharply discussed the stand it
should take. Mgr Langevin, supported by Mgr Laflèche, was of the opinion that
the bishops should take a firm and clear position, supporting both the Remedial
Bill and the Conservative Party, or, at the very least, making it a duty for Catholic
members to support the law. In general, the bishops of the anglophone provinces,
barring exceptions such as Mgr Cameron from Nova Scotia, were more reticent to
commit themselves so openly and to take such a partisan stand. This view was shared
by Mgr Émard, bishop of Valleyfield, and by Mgr Fabre, archbishop of Montreal.
In the document translated below, Mgr Émard expressed his reticence to Mgr Bégin
in a letter dated April 23, 1896. According to Crunican (p. 261) the initials
L. L. G. P. and M. stood for Wilfrid Laurier, Charles Langelier, Alphonse Geoffrion,
Charles Pouliot or Joseph R.-F. Préfontaine and Dominique Monet. (English
translation) « This would only result,
once again, in discrediting the bishops whose word, unfortunately held to be partisan
in nature, will be discussed, used by some for support and by others as a pretext
for insults. There is no way to make such a document appear independent from political
parties and I have not faith in any of them. We must secure for ourselves a tenable
and an honourable position for the very possible case where we might have to present
ourselves, as petionners, before a government made-up of the opponents of today.
Parliaments change; our rights, even considering honourable demands, must remain
intact and indefinite until the victory is complete. As a bishop, I am not convinced
that the adoption of a remedial bill by the parliament in Ottawa, is the only
mean, sure and fast, to gain justice for the Manitoban minority; the current parliament,
with a majority of 40, did not manage that. If it had succeeded, there still would
remain to apply the law, with even greater difficulties under a hostile government;
and if it was applied in practice, there would still be ways to make it only an
illusion (...) Thus, must we, by using absolute language, close all doors to other
possible ways of settlement, means that might be easier under certain circumstances?
The proposed pastoral letter will face formal opposition among the many, not only
among Protestants but even Catholics, who will only see in it electoral tyranny;
it is well-known that politicians are working to obtain such a document. Is it
good management to put the faithfull in the position to disobey us, to disobey
the Church without the certain hope of a solution that would be better than the
present evil? For, and this is serious, let us suppose that the pastoral letter
produces all its results among Catholics, do you suppose that it will prevent
the election of L. L. G. P. and M.? No; now there remains only three or four candidates
who will hesitate to make a commitment that they will find very hard and compromising
for the dignity of a Member of Parliament. Any collective pastoral letter that
commits the temporal authority and the prestige of the bishops in the most decisive
of manners would have effect on only three or four. It is too little when measured
up against consequences that are so serious. » |