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Last
revised: 23 August 2000 | Tentative
de créer un Ministère de l'Instruction publique / Attempt to create a Ministry
of Education, 1897-1898
Lettre
de Mgr Bruchési à Marchand ROME,
22 novembre 1897. HONORABLE F. G. MARCHAND,
Premier ministre de la province de Québec. MONSIEUR
LE PREMIER MINISTRE, J'arrive
du Vatican où j'ai eu une audience privée du Souverain Pontife, et je viens vous
transmettre une demands que Sa Sainteté vous fait comme chef du gouvernement de
Québec. Je vous ai envoyé immédiatement une dépêche afin de vous avertir à temps,
et je veux maintenant vous donner l'explication que vous êtes en droit d'attendre. Ce
que les journaux ont publié depuis quelques semaines sur le projet de loi que
vous vous proposez de présenter à la prochaine session du parlement provincial,
concernant l'instruction publique, m'a ému. J'y ai vu la menace d'un différend
nouveau au sein de nos populations, la cause de discussions malheureuses qui tourneront
au désavantage de notre race, de divisions parmi les catholiques, et, peut-être
de conflit entre l'épiscopat et le gouvernement. Naturellement,
devant rendre compte à Sa Sainteté de l'état de l'Eglise et des dispositions des
esprits dans notre pays, je n'ai pu lui dissimuler combien je redoutais pour l'union
et la paix des catholiques, la discussion d'une mesure si grave à l'heure présente.
Le Saint-Père l'a compris, sur le champ, et comme je l'assurais de la droiture
de vos intentions, de vos sentiments religieux, de votre profond respect et de
votre filial dévouement pour son auguste personne, il a voulu que je vous écrive
personnellement : « Ecrivez à M. Marchand; dites-lui que le Pape veut la paix
et l'union de tous les catholiques du Canada; qu'il veut qu'on écarte pour le
moment toute mesure qui pourrait les diviser. Dites-lui que le Pape demande avec
instance de ne pas présenter cette loi, de ne pas traiter cette question maintenant,
et de ne pas toucher pour le moment au système de l'Instruction publique dans
votre province ». Je
m'acquitte de ma mission, monsieur le ministre. Vous voyez. les raisons qui ont
fait parler le Saint-Père; j'aime à croire que vous vous y rendrez avec tous les
membres de votre cabinet, et ce sera, soyez-en sur, pour le plus grand bien de
notre pays que vous désirez avant tout. En accédant à ce désir pressant du Souverain
Pontife, vous éviterez à notre peuple le spectacle de luttes regrettables, vous
garderez unies des forces précieuses pour le bien et vous donnerez au monde un
bel exemple de déférence et de respect envers le grand pape dont la sollicitude
embrasse toutes les églises et tous les pays. C'est
dans cet espoir que je demeure, Monsieur
le ministre, Votre dévoué serviteur, (signé)
PAUL, Arch. de Montréal. Source: Louis-Philippe
Audet, « Le projet de ministère de l'instruction publique en 1897 », dans Mémoires
de la société royale du Canada, Vol. 1, quatrième série, juin 1963, pp. 133-161,
pp. 141-142. © 2000 Claude
Bélanger, Marianopolis College |