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Last revised:
23 August 2000


Les Québécois, le clergé catholique et l'affaire des écoles du Manitoba / Quebecers, the Catholic Clergy and the Manitoba School Question, 1890-1916

Réactions cléricales aux attaques libérales contre le sermon de Mgr. Laflèche

[Note de l'éditeur : Les attaques féroces de la presse libérale, spécialement l'article de Pacaud publié dans L'Électeur du 6 juin, provoquèrent un ralliement d'une forte partie du clergé du côté de Mgr. Laflèche. L'attitude de l'Électeur allait, éventuellement, provoquer la condamnation du journal par une partie de l'épiscopat et, en conséquence, sa disparition.

Mgr. Moreau, qui écrivit le deuxième texte présenté ci-dessous, avait longtemps été un adversaire de Mgr. Laflèche. L'Électeur inséra la lettre de Mgr. Bégin dans son édition du 11 juin. Isolé dans l'épiscopat québécois, Mgr. Émard publia la Lettre Pastorale reproduite ailleurs dans cette collection de document.]

- I -

Lettre du père Paul Benoit

Notre-Dame de Lourdes, Manitoba,

10 juin 1896,

Monseigneur,

Oserai-je me permettre de féliciter Votre Grandeur de l'admirable sermon qu'Elle a prêché dans sa cathédrale, sur la question scolaire et contre les catholiques libéraux ? C'est là un langage vraiment épiscopal, écrasant l'erreur avec toute l'autorité de la pleine vérité catholique ; c'est une note vibrante de la force même du Saint-Esprit, résonnant au loin pour consoler et fortifier la foi des simples.

Votre Grandeur n'ignore pas la fureur que votre parole a suscitée parmi les ennemis et les faux frères. On a imprimé des diatribes et des invectives contre votre sermon. J'ai rencontré un jour en chemin de fer une longue pancarte où je ne sais quel "protestant" protestait contre cette ingérence des évêques catholiques dans les choses de ce aronde. Dieu soit béni! Ces colères montrent que vous avez frappé juste. Le reptile cherche, mais en vain, à mordre le talon qui le presse.

Je me recommande avec ma communauté de vingt religieux et nos paroissiens de Notre-Dame de Lourdes et de Saint-Claude aux bénédictions et aux prières de Votre Grandeur. Que le grand évêque, dont la parole est un glaive si puissant, daigne nous bénir, dans ce pays d'avenir qu'il a évangélisé si longtemps et où nous chantons les louanges de Notre Dieu et Seigneur.

 

P: S. - J'ai lu au prône du dimanche le sermon de Votre Grandeur ; qui a jamais mieux parlé ?

 

 

- II -

Lettre de Mgr. Moreau, évêque de St. Hyacinthe

Saint-Hyacinthe, 10 juin 1886.

Monseigneur,

En présence des grossières injures dont Votre Grandeur est l'objet de la part des journaux impies, L'ELECTEUR en tête, pour les enseignements si clairs, si précis et si opportuns qu'Elle vient de donner du haut de la chaire de vérité, relativement à la loi rémédiatrice pour les écoles du Manitoba, je me fais un devoir de lui exprimer ma respectueuse sympathie, tout en La félicitant de son zèle pour le soutien de la saine doctrine, et en La remerciant de tout coeur du puissant appui qu'Elle apporte à la solution de cette mesure si impérieusement réclamée par la justice divine comme humaine.

Comme doyen de l'épiscopat des trois provinces, vous aviez bien le droit, Monseigneur, d'élever la voix dans une circonstance aussi solennelle, pour faire comprendre comme elle doit l'être la lettre pastorale collective des évêques sur la question, pour démasquer les insignes fourberies des ennemis de la cause sacrée de l'éducation, et pour mettre les fidèles en garde contre les mensonges éhontés de la presse vendue aux pires adversaires de notre sainte religion et de ses sanctifiantes doctrines. Je suis pour ma part très édifié de la vigueur toute apostolique avec laquelle vous avez réclamé les droits de la conscience et de la justice, et je bénis le Ciel du zèle ardent et éclairé qu'il vous a mis au coeur pour tracer aux hommes, de quelque parti qu'ils soient, la conduite qu'ils ont à tenir à l'heure présente, où une question religieuse des plus graves s'impose à leur considération.

Votre éloquente, solide et persuasive prédication, a retenti dans tous les coins et recoins du pays. Aussi heureux que vos ouailles, tous les vrais catholiques des trois provinces ont pu la recueillir précieusement et en bénéficier pour l'acquit de leur devoir de circonstance. Votre Grandeur a donc opéré un immense bien, ce que constatent visiblement les clameurs et les vociférations de la presse irréligieuse. Que le ciel l'en bénisse surabondamment et que tout le pays lui en soit bien reconnaissant !

Monseigneur Decelles me prie de vous assurer qu'il est de coeur et d'âme avec Votre Grandeur dans son énergique croisade contre les ennemis et les oppresseurs de nos malheureux compatriotes de Manitoba.

Veuillez bien me croire, de Votre Grandeur, le tout dévoué et humble serviteur.

 

- III -

Lettre de Mgr Labrecque, évêque de Chicoutimi

La Malbaie, 11 juin 1886,

Monseigneur,

Je viens de lire durant ma visite, les articles subversifs de L'ÉLECTEUR au sujet du sermon si juste, si plein de doctrine et si nécessaire que Votre Grandeur a fait dans sa cathédrale il y a quelques semaines. Les insultes de ce journal, dont la mission est d'étouffer la vérité sur les lèvres épiscopales, font l'éloge du doyen de l'épiscopat, et en conséquence je n'ai que des félicitations à vous adresser, et non dès condoléances [...]

Prions pour le succès de la bonne cause, et la défaite des ennemie de l'Eglise [...]

- IV -

Lettre de Mgr. Bégin, Archevêque de Québec, à L'Électeur

[9 juin, 1896]

e constate avec regret que, mettant de côté tout respect pour les lois de la discipline chrétienne et ecclésiastique, vous vous arrogez le droit de critiquer, de censurer publiquement l'enseignement donné, du haut de la chaire sacrée, par un évêque, dans l'accomplissement de sa charge pastorale.

Cette conduite à l'égard d'un vétéran de l'épiscopat est propre à détruire ou à amoindrir le respect dû aux pasteurs légitimes, et produit des effets déplorables au milieu de nos religieuses populations.

N'oubliez pas, Monsieur, que l'Église catholique, dans son enseignement et dans ses actes, ne relève ni du tribunal tout à fait incompétent du journalisme politique, ni de celui de l'opinion publique.

Aussi, comme administrateur de l'archidiocèse, je ne puis m'empêcher de protester énergiquement contre l'attitude actuelle de votre journal à l'égard de Mgr l'évêque des Trois-Rivières, et de condamner sévèrement les articles qui y ont été publiés contre lui.

Je vous engage à rentrer dans les voies du respect qu'un journaliste catholique devrait toujours observer vis-à-vis de ses supérieurs ecclésiastiques ; à défaut de quoi, je me verrai dans la pénible nécessité de censurer de nouveau votre journal et de prendre les moyens efficates pour protéger les fidèles qui me sont confiés.

Vous voudrez bien publier la présente dans votre journal, pour qu'elle puisse atteindre tous les lecteurs des articles qui y sont blâmés.

Source : Robert Rumilly, Monseigneur Laflèche et son temps, Montréal, éditions B. D. Simpson, 1945, 461p., pp. 409-412.

 

© 2000 Claude Bélanger, Marianopolis College