Quebec History Marianopolis College


Date Published:
Juillet 2005

L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia

 

Histoire de la Louisiane française

Chapitre X

Le gouvernement royal : M. de Bienville

(1731-43)

 

Le fondateur de la Louisiane revint à la Nouvelle-Orléans en 1733, Il s'empressa de rédiger un Mémoire sur les indigènes. « Le premier créole, dit-il, se nomme Claude Jousset, fils d'un Canadien. » Puis, en 1734, il préside à l'érection de casernes salubres, aux concessions qu'il accorde aux soldats libérés du service, aux négociations avec les tribus alliées. Le papier-monnaie subit une forte dépréciation commerciale. En 1735, il donne une vigoureuse impulsion à la culture du ver à soie; mais il déplore le manque de métiers pour le tissage. Cependant les Anglais travaillaient les tribus voisines. Celles-ci ont épousé la haine des réfugiés natchez et des déportés aux Antilles. Assurés de l'aide britannique, les Chicachas se montrent insolents et hostiles. M. de Bienville les fait sommer de livrer les Natchez hospitalisés : refus formel des chefs.

 

Le 10 mai 1736 il intime l'ordre au major-Pierre d'Artaguette, frère de l'ancien gouverneur, de le rejoindre au pied du fort ennemi : venant des Illinois, le major accéléra sa marche; remontant la rivière Tombigby, M. de Bienville se trouva retardé, laissant même son artillerie de siège en chemin. Le major attaqua seul prématurément, ses alliés sauvages s'enfuirent; il est cerné avec ses officiers canadiens, Drouet, du Tisné, d'Esgly, de Coulonge, de Saint-Ange, de Tonti et 15 soldats tous sont horriblement torturés et brûlés, ainsi que le Père Sénat, S. J. Le 27, M. de Bienville, à son tour, entreprend l'assaut du fort. Commandés par des Anglais, les Chicachas attendirent les assaillants au pied de la palissade : en deux décharges 80 hommes sont mis hors de combat, tous nos alliés indigènes se sauvant en désordre et forçant la retraite des Français. L'histoire n'a pu démêler encore la vérité sur l'action non concertée des commandants. Le douloureux échec appelait une revanche retentissante.

 

Le gouverneur réclama des secours de France et du Canada. Les ententes avec les alliés indiens sont interminables. Il fallut deux années de préparatifs. M. de Noailles. d'Aimé amena 300 soldats de la marine; M. de Longueuil, neveu du gouverneur, secondé par M. de Céloron de Blainville, commandait 200 Canadiens; M. Le Blanc, 100 soldats des Illinois; M. de Bienville, 400 de la colonie; 600 Sauvages, Iroquois, Missouris, Abénakis, Chactas, Chérakis; 200 nègres pour conduire les chariots, 50 libres et 60 domestiques : total 1,700. M. de Bienville avait fait construire le fort l'Assomption - aujourd'hui Memphis, - pour servir de bases aux opérations futures et y emmagasiner des provisions. Mais dès le début de l'expédition, certains groupes indigènes désertèrent, les chevaux mouraient et les hommes également.

 

Le 4 janvier 1740, M. Fontaine Meine, l'un des officiers de France, notait avec douleur : « Nos compagnies de 50 hommes sont réduites à 25; de nos dix bombardiers il en reste trois. On ne peut agir sur nos Sauvages qu'avec du vin et alors ce ne sont que querelles entre Canadiens et Indiens ivres. » Ces forces imposantes se trouvaient immobilisées et se décimaient, faute de trouver un chemin d'accès. M. de Céloron, à l'avant-garde, frappa soudain un coup hardi. Epouvantés de la perte de 36 hommes, les Chicachas assiégés à peine viennent demander la paix à deux genoux. M. de Bienville, ému, jugea prudent de la leur accorder et la signa, au mois d'avril 1740. Cette paix hâtive, payée par une dépense de près de deux millions et de la vie de 500 hommes enlevés par les maladies, attira au gouverneur le mécontentement des officiers, des soldats, des alliés, des civils; elle le discrédita presque auprès de la Cour. « Mon étoile pâlit », s'écria-t-il; et il avait raison; susceptible, soupçonneux, abattu, il ne voulut point se raidir contre sa mauvaise fortune.

 

En 1742, il fut rappelé; mais il conserva ses fonctions jusqu'à l'arrivée de son successeur. A son retour en France, il se retira à Paris avec une pension de 1,800 livres. La Louisiane comptait alors environ 4,000 blancs et 2,000 nègres.

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Source  : Louis LE JEUNE, "Histoire de la Louisiane française. Le gouvernement royal : M. de Bienville", dans Dictionnaire Général de biographie, histoire, littérature, agriculture, commerce, industrie et des arts, sciences, mours, coutumes, institutions politiques et religieuses du Canada , Vol. 2, Ottawa, Université d'Ottawa, 1931, 829p., pp. 187-188..

 

 
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