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L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia
Luc de La Corne
LA CORNE (Luc de), sieur de Chaptes et de Saint-Luc (1711-84), frère de François-Josué, cadet, enseigne lieutenant, capitaine, chevalier de Saint-Louis, conseiller législatif, colonel d'infanterie.
Baptisé en 1711, il fut connu dans la suite sous le nom de Saint-Luc ou Saint-Luc de La Corne. Le 20 mars 1734, cadet dans les troupes, il faisait la campagne dirigée contre les Sakis et les Renards du Wisconsin. En 1735, on le nomma enseigne en second. En octobre 1741, il était témoin à un mariage célébré au fort Saint-Frédéric. Le 10 avril 1742, M. de Beauharnois le proposait pour le grade d'enseigne en pied, pour sa bravoure au fort Clinton, l'année précédente. En janvier 1746, le gouverneur lui confia 150 hommes pour se joindre à M. de Saint-Pierre et mettre à couvert le fort Saint-Frédéric. En mai et juin 1747, M. Rigaud de Vaudreuil détacha du fort M. de Saint-Luc avec 200 hommes pour aller opérer une descente à Sarastau (Saratoga) : ce parti fit 40 prisonniers dont un officier. Le 15 février 1748, M. de Saint-Luc fut promu lieutenant. En 1752, il sert au fort Présentation. Le 15 mars 1758, on lui accorde le grade de capitaine; le 6 novembre, M. de Vaudreuil écrivait à son sujet au ministre : « Ce capitaine a très bien servi dans tous les temps. Il a fait toutes les campagnes depuis cette guerre, et s'est toujours distingué, particulièrement à Carillon, ayant été à la tête d'un détachement en embuscade sur le chemin du fort Lydius, où il a entièrement défait un convoi ennemi. Il est d'ailleurs aimé des Sauvages et sait les faire mouvoir. » Dans cette action, en effet, il s'empara de 150 voitures appartenant à l'armée du général Abercrombie. Il était le grand favori des tribus, dont il parlait les langues. Le 9 juin 1758, il commandait un corps composé de Nipissings, d'Algonquins et d'Iroquois. En 1759, il fut nommé chevalier de Saint-Louis.
Dans la dernière campagne, étant toujours à la tête d'environ 1.000 hommes, il alla intercepter par ordre la marche du colonel Haldimand vers Niagara. Ce dernier fut attaqué par surprise; la troupe de M. de La Corne fit feu de toutes parts. Par malheur, quelques Canadiens prennent l'alarme et courent à leurs bateaux, après un combat de deux heures. Le lendemain matin, nos troupes recommencent l'attaque. Mais Haldimand fait apporter ses canons de campagne et les charge à mitraille : les hommes fuient vers les embarcations et disparaissent, laissant 30 tués et blessés, y compris deux officiers. M. de La Corne, atteint d'une balle à la cuisse, fut surnommé le général des Sauvages. En 1760, il fut blessé de nouveau à la bataille de Sainte-Foy.
En 1761, il s'embarqua sur l'Auguste pour se rendre en France : il fut l'un des sept sauvés du naufrage. Le 28 mars 1762, il se trouvait à Longueuil. Après le traité de Paris, il eut l'occasion de passer en France afin de procurer des ornements sacrés aux églises dévastées. Au retour, voulant éviter les frais de douane, il donnait comme autant d'insignes de son rang dans sa tribu les divers ornements encaissés et se lançait dans de longues tirades en pure langue indigène.
Le 17 août 1775, il fut assermenté au Conseil législatif, où il siégea jusqu'à sa mort. On lit dans la correspondance de Montgomery, en juin 1775, qu'il avait organisé contre lui les hordes farouches des indigènes alliés. « M. de La Corne, dit-il le 6 octobre, et quelques citoyens influents de Montréal vont me faire certaines propositions. Saint-Luc est un roué et madré. » Il ajoute, trois jours après : «Les pourparlers avec lui n'ont abouti à rien... Il a fait remettre ma lettre au gouverneur Carleton par un Indien.» (V. Mém. Soc. Roy. Can., table). Au mois d'août 1777, tous les Sauvages à Wood Creek, au nombre de plus de 500, que commandait M. de La Corne, l'abandonnaient et prenaient la fuite (V. A. Gosselin, EgI. du Can.). Le général Bourgoyne en rejeta ouvertement la faute sur le commandant. Celui-ci, le 23 octobre 1778, dans une lettre publiée à Londres, rappelait à son accusateur que son origine valait bien celle du général bâtard; que ses cinquante années de service démontraient qu'il avait su affronter les périls des combats; que, si les Sauvages avaient déserté son drapeau, c'était par incurie de sa part. Il fut promu colonel par le gouvernement britannique.
M. de Saint-Luc mourut le 5 octobre 1784. Il avait contracté en 1742 un premier mariage avec Marie-Anne Hervieux, qui fut mère de sept enfants : un second en 1757 avec Marie GuiIIemin, morte sans postérité; un troisième en 1774 avec Marguerite Boucher de Boucherville.
Source : Louis LE JEUNE, «Luc de La Corne», dans Dictionnaire général de biographie, histoire, littérature, agriculture, commerce, industrie et des arts, sciences, mœurs, coutumes, institutions politiques et religieuses du Canada, Vol. II, Ottawa, Université d’Ottawa, 1931, 829p., pp. 20-21.
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Claude Bélanger, Marianopolis College |