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L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia
Louis-Delavoie Durand
Louis-Delavoie Durand, qui aurait compté cette année cinquante années d'admission au barreau, journaliste, homme politique et auteur, est décédé après une longue maladie au sanatorium Cook de Trois-Rivières, le 12 janvier 1965. Il était en sa 76e année.
Né à Trois-Rivières le 29 décembre 1888, du mariage de Louis Durand, marchand, et de Louise Brunelle-Beaufort, après ses humanités au petit séminaire de sa ville, il alla suivre des cours de perfectionnement au collège St. Dunstan de Charlottetown, Ile-du-Prince-Edouard.
Bachelier, il vint faire son droit à l'Université Laval de Montréal, tout en pratiquant le reportage au quotidien, le Devoir, qui venait de naître.
Admis au barreau en janvier 1915, il débuta dans la pratique au bureau de Gonzalve Desaulniers, plus tard juge à la Cour supérieure. De là, il passa quelques mois à l'ancien cheflieu du district de Terrebonne, à Sainte-Scholastique (Deux-Montagnes) chez Calixte Ethier, député des Deux-Montagnes à la Chambre des communes, plus tard juge en chef de la Cour de circuit de Montréal. Retourné en sa ville natale en 1918, il y devint associé d'Edouard Langlois, et de l'ancien premier ministre Maurice-L. Duplessis. Puis il eut seul son bureau.
En 1925, il s'associait à François Désilets, qui fut bâtonnier de Trois-Rivières en 1929.
Mais Louis-D. Durand n'avait jamais tout à fait abandonné sa plume. Il avait fondé à Trois-Rivières en 1918, et dirigé pendant trois ans, un hebdomadaire, l'Eveil, journal d'opinion.
Dès les années 1920, il donna au périodique montréalais, l'Action française, alors dirigé par le professeur et historien l'abbé Groulx, des études portant, si nos souvenirs sont exacts, sur l'Amérique latine.
Il donna également des articles à un périodique de Paris, l'Assaut, puis à la Revue Trimestrielle Canadienne, organe de l'Ecole polytechnique de Montréal. Conférencier, il porta la parole sur des sujets d'histoire et de civisme à Montréal, à Ottawa et chez les Franco-Américains de Woonsocket, Rhode-Island. Dans les années 1930, Trois-Rivières vit se former un courant de recherches d'histoire locale qu'anima en particulier le préfet des études du séminaire, l'abbé, plus tard Mgr Albert Tessier - dont le père mourut centenaire, à La Pérade - . Ce mouvement, sans doute inégalé dans la province, donna lieu à de nombreuses publications sur la région.
Louis-D. Durand fut du premier groupe des animateurs. Quand le temps vint de pourvoir à l'organisation des fêtes du troisième centenaire de la fondation de la ville (1934), ses collègues le portèrent à la présidence du comité des commémorations.
Grâce à lui, aidé du journaliste montréalais, M. Léon Trépanier, O.B.E., les célébrations, qui coïncidèrent avec les manifestations tenues à l'échelle nationale pour commémorer la première exploration du Canada par Jacques Cartier, furent un grand succès et rappelèrent de près la célébration grandiose du troisième centenaire de Québec, un quart de siècle auparavant, en 1908.
Louis-D. Durand eut l'honneur d'accueillir, à Trois-Rivières, les délégués du Royaume-Uni et de la France venus aux fêtes du quatrième centenaire du Canada.
Malheureusement en se dirigeant de Trois-Rivières à Montréal avec son collègue précité, un accident de la route conduisit Louis-D. Durand à l'hôpital pour de longs mois. Il survécut heureusement à de longues opérations, dont une trépanation, mais il en resta marqué et il dut abandonner l'exercice de sa profession.
Dans l'intervalle, il s'était porté deux fois candidat dans Trois-Rivières aux élections générales du Canada, la première, à celle de 1930, comme représentant du parti conservateur, et la seconde en 1935, comme réformiste d'un nouveau parti dit de la restauration, fondé par un ancien membre du gouvernement Bennett, M. Stevens.
Il y fut défait les deux fois.
Un chroniqueur a signalé qu'il avait également posé sa candidature en 1937 à la mairie de sa ville.(1)
Désormais la vie de Louis-D. Durand se passa à l'étude. Il voyagea entre sa ville, les deux capitales, fédérale et provinciale, et la métropole. Il s'y enfermait dans les grandes bibliothèques et les services d'Archives. Pendant des années, il recueillit à travers les ouvrages des innombrables voyageurs qui habitèrent, ou franchirent, notre pays, les témoignages, significatifs ou pittoresques, souvent contradictoires, sur la population et la vie de la vallée du Saint-Laurent aux siècles passés.
Il publia sur ce sujet deux volumes, dont le premier, Paresseux, Ignorants et Arriérés ? (2) - avec le point d'interrogation, qu'on oubliera toujours dans les citations. De là que des analystes jugèrent ce titre peu heureux.
A ce gros ouvrage, où il avait recueilli les sentiments d'auteurs souvent hostiles à nos modes de vivre, il donna en complétant son diptyque, une suite intitulée Laborieux, Diligents et Débrouillards . (3)
Il va de soi, ces ouvrages ne s'adressent guère au grand public; ils sont plutôt destinés aux travailleurs de facultés, aux chercheurs en sociologie et en histoire.
Original en tout, Louis-D. Durand avait encore la délicatesse - et le loisir - de faire composer, au sens propre, des dédicaces personnelles à ceux de ses correspondants qui lui avaient indiqué des sources précieuses à ses yeux.
Ces dernières années, à l'incitation de l'auteur de ces lignes, il s'était intéressé au passé du barreau de Trois-Rivières. Avec l'ancien bâtonnier, François Lajoie, il avait dressé la galerie de ses bâtonniers (4) depuis sa constitution en 1849, aussi ancienne que celle de Montréal et de Québec, ce qu'on avait oublié en cours de route.
Il avait également recueilli quantité de traits pittoresques ou significatifs de la vie de la profession à Trois-Rivières.
Son grave accident de 1934 avait fini par porter toutes ses conséquences. Depuis une année ou deux, Louis-D. Durand ne s'était pas remontré à Montréal.
II ne s'était pas marié. Une soeur, Germaine, lui survit.
Obsèques à la cathédrale de Trois-Rivières où ses anciens confrères du barreau, des représentants de l'enseignement et de la presse, lui firent cortège à sa dernière demeure, au cimetière Saint-Louis de Trois-Rivières.
(1) F. GAGNON, le Nouvelliste, Trois-Rivières, 14 janvier 1965. Gracieuseté de Me Claude Bisson, de Trois-Rivières. (2) Trois-Rivières, 1955. (3) Trois-Rivières, 1959. (4) [1958] R. du B. 498.
Source : Jean-Jacques LEFÈBVRE, « Nos disparus - Louis-D[elavoie] Durand », dans Revue du Barreau , Vol. 26, No 3 (mars 1965) : 168-170. Le texte a été reformaté pour l'édition sur le web. Nous remercions les éditeurs de la Revue du Barreau de nous avoir aimablement donné la permission de reproduire cette biographie.
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Claude Bélanger, Marianopolis College |