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L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia
S. E. Monseigneur François-Xavier Ross
Né le 6 mars 1869, aux Grosses-Roches, Mission de Ste-Félicité, dans le comté actuel de Matane. Son père : Joseph Ross, colon défricheur et cultivateur. Sa mère : Marcelline Gendron, fille de Germain Gendron et de Délina Dubé, de St-Octave de Métis.
Par les soins de Monseigneur F.-X. Bossé, préfet apostolique du Golfe St-Laurent, qui songeait à se recruter un clergé, le jeune Ross fit ses études classiques au Séminaire de Québec, de 1883 à 1890, année où il commença ses études théologiques. Destiné jusque-là aux missions de la préfecture, il se trouva naturellement revenu à son diocèse d'origine, Rimouski, par le fait que Mgr Bossé abandonna à cette époque son poste du Golfe St-Laurent qui fut administré par l'Évêque de Chicoutimi.
Après une première année d'études théologiques au grand séminaire de Québec, le Séminaire de Rimouski requit du nouvel Évêque, Mgr A.-A. Blais, les services de l'abbé Ross qui dut à regret quitter ses études et son milieu familier pour venir se livrer à l'enseignement et à la surveillance au Séminaire de Rimouski, poursuivant ses études théologiques selon que l'enseignement lui en accordait le loisir, comme c'était malheureusement la nécessité du temps.
Après une année d'enseignement en mathématiques. Mgr l'Évêque de Rimouski le nomma secrétaire de l'Évêché, charge qu'il remplit les deux dernières années de ses études théologiques. Ordonné prêtre le 19 mai 1894, à la Cathédrale de Rimouski, par Mgr A.-A. Blais, il resta encore deux ans à remplir l'office de secrétaire de l'Évêché, jusqu'à l'automne de 1896.
Mgr François-Xavier Ross Premier évêque de Gaspé (1922-1945) À ce moment, sa santé l'obligeant à abandonner cette vie de réclusion et de travail ardu au bureau - où il eut pour assistant le jeune séminariste Léonard qui devint plus tard Evèque de Rimouski - il fut nommé missionnaire à St-Laurent de Matapédia où il demeura deux ans, puis premier curé de l'Anse-aux-Gascons de 1898 à 1901 et de St-Louis-du-Ha! Ha!, Témiscouata, de 1901 à 1904. Sa santé faisant encore défaut à ce dernier endroit, le médecin le croyant atteint de tuberculose, il demanda un congé à son Évêque. Mgr Bais accéda à sa demande en 1904 et le dirigea vers Rome avec l'idée de lui faire suivre des cours de droit canonique à l'Apollinaire. Ce qu'il fit pendant deux ans et décrocha le doctorat en droit canon.
À son retour en 1906, il fut nommé principal de la nouvelle école normale de filles, érigée à Rimouski par les soins de Mgr Blais et placée sous la direction des Ursulines de Québec; poste qu'il occupa jusqu'en 1923. Entre temps il fut nommé Chanoine de la Cathédrale de Rimouski en 1907, professa la théologie au Grand Séminaire de Rimouski en 1908 et en 1909, puis assista au Premier Concile Plénier de Québec, en 1909, comme théologien de Mgr Blais.
Nommé Vicaire Général en 1914, tout en continuant la direction de son école normale, il dirigea aussi la procure de l'Évêché et organisa les fêtes jubilaires de Mgr Blais en 1915. À la mort de ce dernier, janvier 1919, le Chapitre nomma Mgr Ross Vicaire Capitulaire pendant la vacance du Siège. Mgr J. Léonard, successeur au Siège Épiscopal de Rimouski le nomma son Vicaire Général en février 1920 et lui obtint de Rome le titre de Protonotaire Apostolique. Enfin le 11 décembre 1922 il était préconisé Évêque. de Gaspé et fut consacré à la Cathédrale de Rimouski le 1er mai suivant par Mgr P. di Maria, délégué Apostolique au Canada.
À regarder son oeuvre après coup, on constate que Mgr Ross eut la mission d'organiser. À Matapédia, secrétaire d'une société de Colonisation, il collabora à la colonisation de la Vallée de Matapédia et fonda la colonie de St-André. Premier curé de L'Anse-aux-Gascons, il dut organiser cette paroisse dans toutes ses activités : paroissiale, scolaire, municipale et religieuse, construire l'église, le presbytère et ses dépendances.
Au Témiscouata, il lui fallut agrandir les limites de la paroisse et préparer le terrain pour une construction d'église que son départ l'empêcha de poursuivre.
Après son retour de Rome, il organisa l'école normale de Rimouski sur des bases qui servirent à orienter les nouvelles écoles normales que l'on commença de multiplier dans la Province, après celle de Rimouski. C'est pendant cette période que, mêlé au mouvement pédagogique, il fut le principal ouvrier de la refonte du programme des écoles primaires de la Province en 1922, et des directions pédagogiques qui l'accompagnent. À cette occasion il eut à soutenir une lutte assez âpre, dans les journaux, pour retarder au moins en troisième année du cours de l'école primaire française, l'introduction de l'enseignement de l'anglais que certains voulaient anticiper à la seconde, même à la première année, et pour faire donner aux jeunes gens qui se destinent au commerce une culture plus appropriée au génie de la race française que trop limité au calcul et à l'anglais. Ces articles ont été publiés en brochure sous le titre de Questions scolaires .
Mais c'est surtout à Gaspé que l'attendait sa mission d'organisateur. Là tout était à faire ou, comme il aime à dire en souriant, tout était à créer, puisqu'il fallait faire les choses avec "rien".
Dès sa prise de possession, le 3 mai 1923, il lança un mandement d'entrée qui fit connaître les grandes lignes du programme qu'il entendait suivre. La devise qu'il donna à son diocèse fut cette exhortation de S. Paul : "Crescamus in Illo per omnia via : progressons en Jésus-Christ dans tous les domaines". Et il énumère ces domaines dans lesquels la Gaspésie doit spécialement faire valoir ses activités : domaine religieux, par une vie chrétienne plus intense; domaine de l'éducation, de l'école primaire au séminaire qui n'existait pas; domaine économique par l'agriculture et la colonisation, l'organisation des pêcheries, les voies de communication, les industries locales, les marchés.
Dans des circulaires subséquentes il revint sur ce programme général pour en faire les applications en jetant ce mot d'ordre : "Organisons-nous". Et l'organisation a commencé. Ce fut d'abord dès 1924 l'école normale, conduite par les Ursulines avec lesquelles il avait travaillé à Rimouski. Puis en 1925 le séminaire, conduit par les Jésuites; en 1926, l'Hôtel-Dieu, tenue par les Augustines Hospitalières de l'Hôtel-Dieu de Québec. La présence de ces trois Ordres religieux lui faisait dire : "Je recommence la fondation de la Colonie". En 1933 il régularise la situation de l'hôpital de Chandler en le transformant en hospice pour les vieillards.
Il lançait dès la première année de son administration un grand mouvement d'agitation pacifique pour amener le Gouvernement Fédéral à faire entrer dans le réseau du chemin de fer Canadien National, le misérable tronçon de 202 milles qui relie Gaspé à la grande voie de l'Inter-colonial à Matapédia. La chose fut finalement accordée après quelques années de lutte persévérante. Pendant ce temps se poursuivait la construction de la route de ceinture qui rendit la Gaspésie accessible aux touristes.
Dès le premier automne aussi il commença, avec le concours sympathique de l'Honorable J.-E. Perrault, Ministre de la Colonisation et des Pêcheries, un mouvement de colonisation et d'organisation des coopératives de pêcheurs. Ce dernier mouvement, qui a produit d'excellents résultats et auquel on devra nécessairement revenir si l'on veut vraiment améliorer le sort de la classe des pêcheurs, a succombé sous une foule de causes qu'il n'importe pas d'énumérer ici, mais qui sont inhérentes à toute entreprise destinée à arracher une classe à l'emprise d'une autre.
La colonisation par des pêcheurs ne manque pas de difficultés. La crise aidant, on a cependant pu créer onze centres nouveaux avec six prêtres résidants. En outre trois nouvelles paroisses ont été érigées à même les paroisses ou missions existantes en 1923. Ce qui augmente de neuf les centres religieux avec prêtres résidants.
En 1934, l'Évêque de Gaspé se trouva aussi mêlé à l'organisation des fêtes du Quatrième Centenaire de la prise de possession du Canada par Jacques Cartier. Le Gouvernement Canadien prit officiellement part à ces fêtes auxquelles se rencontrèrent, avec l'imposante mission française, les représentants du Canada, de l'Angleterre et des États-Unis. On y érigea une monumentale croix de granit dans un concours de solennités dont la presse et la radio ont porté les échos dans toutes les parties des deux continents. À cette occasion il fut nommé par le Saint-Siège Comte Romain et Évêque Assistant au Trône Pontifical et la France lui attribua le titre de Chevalier de la Légion d'Honneur.
En 1929, l'incendie de la petite Cathédrale de Gaspé fut une terrible épreuve pour son Évêque. Sous les suggestions de l'Honorable Rodolphe Lemieux, député de Gaspé pendant plus d'un quart de siècle, un comité de citoyens forma le projet de célébrer le Quatrième Centenaire de la découverte du Canada en élevant à Gaspé même, où Cartier avait planté sa croix, une église-souvenir qui serait dédiée au Christ-Roi et dont la garde serait confiée à l'Évêque de Gaspé qui l'utiliserait pour en faire sa Cathédrale. Diverses raisons ont retardé le lancement de ce projet qui fut bien reçu partout et loué par le Souverain Pontife. Mais la crise économique est survenue qui a englouti ce projet avec bien d'autres. Mgr Ross ne s'est pas encore toutefois départi de sa confiance obstinée et, ne pouvant faire davantage pour le moment, il a voulu qu'au moins la pierre angulaire du monument fût posée à l'occasion du Centenaire. Et c'est sur le toit de la crypte de la basilique rêvée que son Éminence le Cardinal Villeneuve chanta la messe solennelle d'action de grâces du Quatrième Centenaire. Les souscriptions restent toujours ouvertes pour terminer ce monument dont le Canada catholique doit avoir à coeur d'assurer le parachèvement.
Gaspé doit encore à la ténacité de son Évêque la construction d'un magnifique pont de fer qui relie les deux rives du Bassin de Gaspé. À l'inauguration de ce pont, l'Évêque put dire : "Aujourd'hui disparaît le dernier des onze bacs dont on se servait encore en Gaspésie la première fois que j'en fis le tour en accompagnant Mgr Blais dans sa visite pastorale en 1893".
Mgr l'Évêque de Gaspé fut aussi le fondateur d'une nouvelle Congrégation religieuse de femmes ayant pour nom : "Les Soeurs Missionnaires du Christ-Roi". Fondée en 1929, cette petite Congrégation compte maintenant près de quarante sujets, une fondation à Tokio, Japon, et une procure à Montréal.
Titres . - Docteur en Droit Canon, Mgr Ross a été nommé par l'Université Laval Docteur en Théologie Honoris causa; il est membre de la Société Royale du Canada, Chevalier de la Légion d'Honneur et fut anobli par S. S. Pie XI avec le titre d'Assistant au Trône Pontifical de Comte Romain.
Publications . - Mgr Ross publia les ouvrages suivants : en 1913 une conférence donnée sur Louis Veuillot et la Presse Catholique . En 1914, un Manuel de Pédagogie qui en est rendu à sa quatrième édition et à son trentième mille. En 1916, il publia sous le nom de Une page d'Histoire de l'Église , le récit des fêtes jubilaires de Mgr Blais, Évêque de Rimouski. Enfin, il publia les Questions Scolaires dont il a été question plus haut.
Voyages . - Mgr Ross fit à deux reprises son voyage ad limina, la première fois en 1929, où il assista aux solennités qui clôturèrent l'année jubilaire de S. S. Pie XI. À la même occasion il assista aussi à la remise des insignes aux Cardinaux Pacelli et Verdier entre plusieurs autres. À son deuxième voyage en 1935 il assista au Consistoire préparatoire à la Canonisation des Bienheureux Martyrs Anglais Morus et Fisher, puis à la solennité de leur Canonisation.
Oeuvres préférées . - Fils de colon, Mgr Ross est un fervent de la colonisation dans laquelle il voit une oeuvre à la fois patriotique, sociale, morale et religieuse. Missionnaire dans la Matapédia, il fut le Secrétaire de la Société de Colonisation. Vicaire Capitulaire, il a fondé la Société de Colonisation de Rimouski et lui a donné son élan. Cette oeuvre fait partie capitale de son programme comme Évêque de Gaspé, nous l'avons vu. On peut dire que c'est là l'une de ses oeuvres préférées.
On lui doit aussi l'idée, et sa première exécution, d'une école Moyenne d'agriculture à Rimouski. Comprenant que son diocèse ne pourra se relever économiquement que par l'agriculture, il obtint du Gouvernement de Québec, en 1930, une concession de 1800 acres de terrain dans le canton de Percé pour y établir une communauté qui devait, avec le temps, prendre la direction d'une école d'agriculture et devenir un foyer de progrès agricoles dans la Gaspésie. Les oeuvres de Dieu sont toujours marquées de la croix : c'est quand elles semblent anéanties quelles sont près de la résurrection. Il en sera ainsi de l'oeuvre du Val d'Espoir.
Une autre oeuvre pour laquelle Mgr Ross manifesta depuis longtemps une dilection marquée, c'est l'oeuvre missionnaire. À Rimouski il organisa l'oeuvre des vocations qu'il prêcha dans les paroisses du diocèse, en faisant valoir les besoins non seulement du diocèse, mais aussi des missions. Quand il partit de Rimouski, trente-cinq enfants étaient soutenus par cette oeuvre
Il continua à Gaspé l'Oeuvre des Vocations qui se fondit avec celle de son Séminaire diocésain. Par ailleurs son zèle pour les missions trouva une expression concrète dans la fondation de la Congrégation des Soeurs Missionnaires du Christ-Roi.
Source : Raphaël OUIMET, éd., Biographies canadiennes françaises, treizième édition, Montréal, 1937, 461p., pp. 213-214. Le texte a été reformaté et les erreurs typographiques ont été corrigées.
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Claude Bélanger, Marianopolis College |