Quebec History Marianopolis College


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L’Encyclopédie de l’histoire du Québec / The Quebec History Encyclopedia

 

Samuel de Champlain

Deuxième voyage : Honfleur à Montréal, 1603

 

 

[Ce texte a été rédigé par Louis-Marie Le Jeune, o.m.i.; il fut publié dans son Dictionnaire en 1931. Pour la citation exacte, voir la fin du texte. Pour une courte biographie du Père Le Jeune et une discussion de la valeur de son Dictionnaire, voir ce texte.]

 

III. Deuxième voyage : Honfleur à Montréal (1603). - De retour en France, Champlain eut avec le roi une entrevue. Henri IV, d'après le Père Leclercq, lui conféra aussitôt le titre de géographe royal . Peu de temps après, le navigateur s'abouchait avec le commandeur de Malte, Aymar de Chaste, héritier de la commission de Chauvin (V. ce nom), qui voulait s'assurer un rapport exact de l'entreprise à faire au Canada. Dans ce dessein, il fit équiper à ses frais la Bonne Renommée et confia à Champlain et au pilote Dupont-Gravé l'exploration du fleuve Saint-Laurent.

 

Dans la dédicace de sa relation du Voyage , adressée à Charles de Montmorency, l'auteur affirme «qu'il a été expressément sur les lieux, pour pouvoir rendre fidèle le témoignage de la vérité». Le bâtiment appareilla le 15 mars 1603.

 

Chap. 1er. - De Honfleur à Tadoussac. Le trajet nécessita une escale au Havre-de-Grâce; on reconnut ensuite Aurigny, Guernesey, Ouessant en Bretagne, et on rencontra sept vaisseaux flamands. Puis, tempête qui dura 17 jours jusqu'au 16 avril; douze jours après, fort haute glace (banquise) ayant un banc de 8 lieues de long, interceptant le passage. Le vaisseau atteint le banc de TerreNeuve le 2 mai, le cap Sainte-Marie le 7, l'île Saint-Pierre le 15, le cap Ray le 18, l'île Anticosti et Gaspé le 20, rangeant la côte de Matane jusqu'au Bic, d'où il traversa à Tadoussac le 24.

 

Chap. 2. - Réception amicale des indigènes . - Le 27, l'équipage alla vers les huttes des Sauvages à la pointe Saint-Mathieu (Alouettes), accompagné des deux que mena auparavant en France voir le roi le sieur Dupont-Gravé., Ceux-ci dirent au grand sagamo (Anadabijou) quel bon traitement ils avaient reçu, quels beaux palais, châteaux, maisons et quels peuples ils avaient vus. Le chef alors prit du pétun (tabac), en donna à Dupont et à Champlain, adressa aux hôtes sa harangue, suivie d'un grand festin avec 9 ou 10 chaudières pleines de viandes : « Ils mangent fort salement.» La danse devint générale entre la centaine de personnes avec les! scalpes des Iroquois immolés à la guerre. Le 28, tous vont aux vaisseaux à Tadoussac sur leurs canots longs de 8 à 9 pas. « Leurs cabanes sont basses, le haut découvert d'un pied et ils y couchent sur des peaux avec leurs chiens.»

 

Chap. 3. - Moeurs et coutumes . - Le 9 juin, tabagie des Algonquins, hommes, femmes, enfants dansant sur place et leur chef Tessouat les harangue entre deux rangées de scalpes : Etchemins et Montagnais font des présents. «Tous ces peuples rient souvent, parlent posément, endurent aisément la faim, usent de vengeances, sont grands menteurs, promettent assez et tiennent peu, partent aux diables, croient aux songes, s'habillent depeaux de bête, marchent sur la neige en raquettes, usent de polyandrie avant de prendre mari, enterrent leurs morts dans une. fosse avec tous ses biens, croient à l'immortalité de l'âme, qui émigre dans un monde de puissance avec leurs parents décédés.»

 

Chap. 4. - Rivière du Saguenay . - Le 11 juin, Champlain remonte la rivière à une distance de 12 à 15, lieues. Ce ne sont, à sa vue,, que montagnes couvertes de sapins, cyprès, bouleaux, terre malplaisante, vrais déserts. inhabitables d'animaux et d'oiseaux. Les Sauvages lui firent comprendre que le premier saut (Chicoutimi) étant passé, on en passe. 8 autres sauts et on va en un jour à SaintJe an, où cabanent les Sauvages (Porcs-Epics) ; puis on entre dans trois autres rivières, au bord desquelles il y a quantité de cabanes, où il vient des nations du Nord, près. de la mer salée. A son avis, c'est quelque gouffre de la mer qui dégorge dans la partie Nord de ces terres (Baie d'Hudson).

 

Chap. 5. - De Tadoussac à Québec . - Parti le 8 juin, la troupe touche à l'Ile-aux-Lièvres, à l'Ile-aux-Coudres, à l'île d'Orléans le 22, d'où l'on voit un torrent d'eau - Saut Montmorency qu'il appela ainsi - et arrive à Québec, « qui est un détroit. de la rivière de quelque 300 pas de large. Et il y a le long de la côte de Québec des diamants dans les rochers d'ardoise, meilleurs que ceux d'Alençon (Normandie) ».

 

Chap. 6. - En amont du Saint-Laurent. Le 23 juin, on navigue en amont de Québec, où la rivière s'élargit et où se déchargent d'autres cours d'eau; mouillant l'ancre à Sainte-Croix, le pays étant beau et uni, la. terre noire et sans rochers, avec des rivières du côté du Nord (Batiscan, Sainte-Anne" Champlain). Le 28, on. est aux Trois-Rivières où il y a six îles et plus loin un lac (SaintPierre): l'habitation serait là un bien pour la liberté de quelques nations qui n'osent y venir à cause des Iroquois. Champlain monte une lieue dans la rivière (Saint-Maurice) et ne peut passer outre, à cause du grand courant et d'un saut fort. étroit.

 

Chap. 7. - Continuation du voyage . - Le 29 juin, la barque mouille au lac Saint-Pierre, où descend une rivière (Nicolet) - et l'Ymaska que Champlain n'a pas aperçu reconnaissant plusieurs îles et, le dernier de juin, la rivière. des Iroquois (Richelieu), où. étaient cabanés et fortifiés les autres qui leur font la guerre. L'explorateur y pénétra cinq ou six lieues sans pouvoir passer plus outre : les Sauvages lui insinuèrent qu'il y a plus loin un saut (Chambly), puis deux grands lacs (Champlain et George).

 

Chap. 8. - Au Mont-Royal et au Saut . En cours de route, il vit quantité d'îles fertiles et remplies de gibier, deux montagnes (Boucherville) et l'île devant le Mont-Royal (Sainte-Hélène); puis deux grandes îles (Montréal et Perrot), la montagne, un lac (Saint-Louis) et un saut (de Lachine), torrent d'eau qui déborde avec impétuosité, bien qu'il ne soit pas beaucoup haut. Les Sauvages le renseignent sur les autres lacs (Ontario, Erié, Huron).

 

Chap. 9. - Retour à Tadoussac. - Le 4 juillet, l'expédition redescend à Québec en quatre jours, consignant dans le parcours des observations complémentaires. Néanmoins, à l'île d'Orléans, Champlain se fait entendre suffisamment de trois Algonquins concernant tout le cours du grand fleuve : nulle divergence avec les renseignements déjà recueillis : il est rendu à Tadoussac, le 11 du mois, et met à la voile sans délai.

 

Chap. 10. - Voyage à Gaspé . - Le 13, ayant traversé le fleuve, il s'abouche avec le chef Armouchidès, entouré des siens sur la rive Sud et se rendant aux échanges avec les Sauvages à Tadoussac. Le 15, entrée dans la baie de Gaspé, où descend une rivière (York); puis, visite à Percé et à la Baie-aux-Morues (Chaleurs), à l'île de Bonaventure; pénétrant dans la baie, il rencontre les Micmacs, qui le renseignent sur le lac Matapedia, sur Miramichi, le détroit (de Canseau), de l'île (Saint-Jean) et le Cap-Breton, la future baie Française (Fundy), sur lAcadie à l'Ouest, d'où ils remontent une rivière (SaintJean) pour aller faire la guerre aux Iroquois.

 

Chap. 11. - Nouveau retour à Tadoussac . - Quittant Percé le 19 juillet, la barque double le cap L'Evêque (Fame Point), contrarié bientôt par une tempête de deux jours, franchissant ensuite les eaux du golfe et mouillant l'ancre à une rivière de la côte, que Champlain appela Sainte-Marguerite, en l'honneur de la sainte martyre du 20 du mois, nom qui lui est resté, rangeant la côte dans le reste du trajet.

 

Chap. 12. - Cérémonies d'avant-guerre . - Le 3 août, le parti aborde enfin à Tadoussac, où l'on reconnut les Sauvages de la rivière des Iroquois, qui entamèrent les cérémonies du départ pour une nouvelle guerre danses, festins, tabagie. C'était le dernier contact avec les indigènes si hospitaliers. Le 16, départ; le 18, à Percé, où l'on fut surpris de trouver le sieur Jean Sarcel, seigneur de Prévert, « qui venait de la mine où il avait été avec beaucoup de peine, pour la crainte que les Sauvages de leurs ennemis Armouchiquois , hommes monstrueux de la forme qu'ils ont ».

 

Chap. 13. - Heureuse traversée . - Plusieurs Sauvages assuraient avoir vu le monstre Gougou, ayant la forme d'une femme et d'une telle grandeur qu'ils auraient pu mettre le vaisseau dans sa poche. Même le sieur de Prévert dit à Champlain que lui et son équipage entendaient des sifflements étranges. de la part de cette bête : c'est quelque diable qui les tourmente de cette façon. Avant le départ de Tadoussac, le sagamo Begoura donna son fils au sieur Dupont. Champlain lui demanda une Iroquoise qu'ils voulaient manger : elle vint aussi en France. Le sieur de Prévert, de son côté, emmenait quatre indigènes. Partis de Gaspé, les vaisseaux de Pont-Gravé et de Prévert, le 24 août touchent au cap Rase (Terre-Neuve) le 2 septembre, au Banc le 5, à Ouessant le 16, abordant au Havre le 20 « avec grand contentement d'un chacun». Le 13 mai précédent, le commandeur de Chaste décéda à Dieppe. Champlain s'empresse, en qualité d'ancien sous-officier de l'armée, de soumettre au roi le récit de ses minutieuses observations. Henri IV se montre fort satisfait de l'entrevue. Aussitôt l'explorateur eut recours à la publicité.

 

Il intitula ses notes Des Sauvages ou Voyage de S. Champlain de Brouage fait en la Nouvelle-France en l'an 1603 , avec une dédicace au « très noble, haut et puissant seigneur, messire Charles de Montmorency, chevalier des Ordres du roi, etc. ». M. H. P. Biggar, ancien élève très érudit de l'Ecole des Chartes de Paris, en a édité et annoté le texte français, traduit en anglais (V. OEuvres de Champlain , t. I, Toronto).

 

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[On pourra consulter l'abondante biographie de Champlain au site du Dictionnaire biographique du Canada pour compléter et mettre à jour la biographie du père Le Jeune. On trouvera aussi des informations pertinentes au site de l'Encyclopédie du Canada. Les lecteurs ayant une bonne connaissance de l'anglais pourront aussi consulter la biographie rédigée par Daughty à la Catholic Encyclopedia. Les lecteurs sérieux pourront consulter le texte intégral des Oeuvres de Champlain au site de la Société Champlain.]

Source  : LE JEUNE, L., « Champlain (Samuel de) », dans Dictionnaire Général de biographie, histoire, littérature, agriculture, commerce, industrie et des arts, sciences, mours, coutumes, institutions politiques et religieuses du Canada, Vol. 1, Ottawa, Université d'Ottawa, 1931, 862p., pp. 344-345.

 

 

 

 
© 2004 Claude Bélanger, Marianopolis College