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Documents de l’histoire du Québec / Quebec History DocumentsÉcrits sur les Jeune-Canada
Le Vieux Canada
On s'occupe copieusement, à l'heure actuelle, à nous stabiliser, entre autres choses, une conscience nationale.
Conscience de nos devoirs ethniques, conscience de nos droits comme co-signataires de l'Acte de l'Amérique Britannique du Nord. Le tout résulte d'un mouvement généreux de la jeunesse canadienne-française, mouvement qui a pour but de donner à sa vie nationale une orientation nouvelle, ou même une orientation tout court, mouvement d'ensemble où figurent au premier plan le mot « réaction » et l'expression « revendications de nos droits ».
Les Jeunes Canada [sic] se sont acquis, à coups de travail et de persévérance, l'appui d'un public intelligent. Ils vivront aussi longtemps que dureront le désintéressement et la clairvoyance de leurs chefs.
Le Jeune Canada, tout à la tâche de créer une tradition nouvelle ne saurait toutefois négliger à profit les traditions antérieures à la sienne.
J'aurai longtemps en mémoire la scène suivante qui se déroulait dans un coin ignoré d'une grande ville canadienne lors du dernier anniversaire de l'Armistice.
Il était onze heures moins une minute.
Dans un fond de cour noir et sale, quatre hommes étaient à remplir de vidanges un camion enfoncé jusqu'à l'essieu dans la boue.
À leur aspect battu, on sentait que la vraie gloire humaine avait passé à leur porte sans jamais y frapper.
Soudain, les premiers coups de onze heures retentirent pour mettre frein à l'activité bruyante de la ville.
Au même instant, les quatre journaliers devinrent tout autres.
Sous une pluie froide, la tête découverte et fièrement redressée, quatre héros avaient pris place. Debout dans la fange ils se croyaient bien seuls, mais ils étaient légion.
À leur tête étaient apparues les ombres de mille autres héros, leurs camarades. Ils frôlaient du coude une centaine de générations d'hommes qui avaient affronté la mort - ou plus braves encore - la vie, avec la même flamme dans les yeux.
Ce n'étaient plus quatre hommes qu'on avait sous les yeux, mais plutôt les symboles d'une grande tradition.
Ils incorporaient un esprit vivace d'idéalisme national transmis d'une génération à l'autre.
Notre province, de par ses ressources naturelles encore inexploitées, possède une fortune incalculable.
Mais sa plus grande source de richesses réside dans le cour de ses fils, où est ancré solidement le respect de la tradition.
Aussi longtemps que cet esprit durera chez eux, ils seront en mesure de poursuivre une grande et noble destinée.
Retour à la page sur les Jeune-Canada Source : Ritchie BELLEMARE, « Le vieux Canada », dans Le Quartier latin, 30 mars, 1933, p. 1.
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Claude Bélanger, Marianopolis College |